Il reste encore quelques jours pour signer le référendum et faire front à Frontex

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l ne reste que quelques jours (jusqu'au 19 janvier) pour qu'aboutisse le référendum contre le renforcement du financement de la Suisse à l'agence européenne de gardes-frontières et de gardes-côtes Frontex, lancé par une coalition d'organisations d'aide aux réfugiés, soutenu (trop mollement) par la gauche. Frontex, c'est l'instrument dont l'Europe s'est dotée pour repousser les migrants y cherchant refuge. Et quand on dit "l'Europe", on ne fait pas référence à la seule Union Européenne, puisque la Suisse (notamment) fait de Frontex le même usage que les Etats membres de l'UE. 

On signe ici, contre Frontex, jusqu'au 17 janvier : https://frontex-referendum.ch/fr/

La "honte de l'Europe" est aussi celle de la Suisse

Ce que demande le référendum lancé contre l'augmentation du financement de Frontex par la Suisse (un presque triplement : il passerait de 24 à 61 millions de francs), le parlement européen lui-même le demande : il s'est prononcé pour le gel d'une partie du budget de l'agence, en conditionnant son dégel au respect des droits humains des migrants, à l'engagement d'officiers chargés de s'assurer de ce respect, à la mise en place de mécanismes de surveillance de ce respect et de signalement des incidents aux frontières de l'Europe. Car ces "incidents" sont nombreux, et homicides Et il n'y a pas que la Méditerranée qui soit le lieu d'une tragédie, il y a aussi les forêts de la frontière biélorusse. 

Des milliers de migrantes et de migrants sont depuis des mois pris en otage par les gouvernants de la Biélorussie de Loukatchenko et de la Pologne du parti nationaliste "Droit et Justice", dont le nom même tient du déni de réalité politique. Pour se venger des sanctions européennes,  Loukatchenko a jeté contre les frontières de l'Union Européenne (celles de la Pologne et  des Etats baltes) des migrants qu'il a littéralement importés du Moyen-Orient  en leur assurant qu'ils allaient pouvoir entrer en Europe. Sur quoi la Pologne et les Baltes ont fermé leurs frontières à ces migrants, la Pologne a décidé de construire un mur de 100 kilomètres et a autorisé les refoulements avant tout dépôt d'une demande d'asile. Une zone de non-droit a été instaurée à la frontière, interdite aux ONG et aux media. Les réfugiés, dont des femmes et des personnes âgées se retrouvent confinés dans une forêt et dans un froid glacial. Au moins une dizaine de décès d'entre elles et eux sont à déplorer, pendant que de part et d'autre de la frontière des dizaines de milliers de soldats et de policiers, polonais et biélorusses, se renvoient les survivants. Et l'Union Européenne ne voit rien parce qu'elle ne veut rien voir.

Pas plus qu'elle ne veut voir ce qui se passe dans les camps de stockage des migrants qu'elle finance en Turquie ou en Libye. Dans les six premiers mois de 2021, 15'300 personnes ont été renvoyées en Libye, trois fois plus qu'en 2020. Dans un rapport publié le 15 juillet, Amnesty International dénonce les effroyables violations" des droits humains dans les camps libyens : violences de toutes natures, viols, tortures, disparitions, morts (y compris de bébés) faute de soins. Mais les migrants détenus dans ces camps, par qui y sont-ils amenés ? par des garde-côte formés et financés par l'Union Européenne et par son agence de gardiennage anti-migrants, Frontex. Que la Suisse finance. L'Acte d'accusation contre la Libye est donc aussi un acte d'accusation contre l'UE, ses Etats membres et les Etats associés à Frontex (dont la Suisse) : ni les uns, ni les autres ne peuvent ignorer ce qui se passe dans les camps libyens et ce qu'y subissent celles et ceux qu'on y stocke, dans des camps que le ministère de l'Intérieur libyen a repris des milices islamistes ou franchement mafieuses qui les avaient ouverts, ou reprises du régime de Kadhafi. Le ministère a, de même, offert postes et promotions à d'anciens tortionnaires des milices ou du régime renversé : c'est ainsi que le directeur et les adjoints du centre de Tadjourah ont été mis à la tête du centre Al-Mabani, où  7000 migrants ont été transférés dans les six premiers mois de 2021. Et de 15'000 migrants capturés en mer par les garde-côte libyens, renseignés par Frontex, seuls 6'100 ont été recensés dans des centres de détention officiels sous contrôle international. Les autres ? Dans les camps contrôlés par les milices. Dans le camp de Shara Al-Zawiyah, censé accueillir les personnes les plus vulnérables, dont des femmes, celles--ci y sont battues, violées, contraintes d'accepter des rapports sexuels pour obtenir de l'eau. Dans le centre d'Abu Issa règne la famine. Dans d'autres sévissent tuberculose, varicelle, mycoses, Covid-19. L'aide internationale destinée aux détenus est détournée par les milices.  Pour plus de détails encore, on lira dans la dernière édition du "Monde Diplomatique" l'enquête édifiante de Ian Urbina, "La Libye, garde-chiourme de l'Europe" (https://www.monde-diplomatique.fr/2022/01/URBINA/64243).

L'Europe se ferme aux migrants, Frontex est la clef de cette fermeture à la migration légale. Or moins il y a de possibilités d'immigrer légalement, plus on usera de tous les moyens concevables pour le faire illégalement. Au risque de sa vie. La crise humanitaire en Méditerranée a déjà coûté la vie à des centaines de personnes par jour depuis 7 ans. Le réseau européen SOS Méditerranée a conduit porté secours à environ 35'000 personnes depuis février 2016, dont plus de 5'000 femmes et 8'000 enfants. Dans les six premiers mois de 2021, au moins 1146 personnes sont mortes en tentant de gagner l'Europe. C'est deux fois plus que dans les six premiers mois de 2020 -et il ne s'agit là que des personnes dont on connait le sort, et auxquelles s'ajoutent toutes celles dont on ne connaît pas le sort, et qui souvent ont sombré sans que nul ne le sache, comme ces 23 jeunes "harraga" qui ont pris la mer le 17 décembre dernier à bord d’une embarcation, depuis une plage de Béjaïa.

L’Espagne, seule, a enregistré, durant les neuf premiers mois de 2021, le nombre le plus élevé de migrants arrivés sur son sol : plus de 14 000 migrants clandestins algériens, marocains et subsahariens  ayant effectué la traversée à travers la côte ouest de la Méditerranée, ils sont environ 14 000 individus, Algériens surtout, Marocains, ensuite, puis  personnes venant d’Afrique subsaharienne. L’expert en migration clandestine, Raouf Farah observe la banalisation de ce phénomène, qui touche désormais  toutes les couches sociales : “Le phénomène de la harga s’est fortement banalisé. Une banalisation qui se reflète dans l’omniprésence du sujet au sein de la société et du désir permanent de départ qui anime toutes les couches de la population”, observe-t-il, en expliquant, par ailleurs, que cette banalisation “est aussi alimentée par des réseaux de plus en plus professionnels qui offrent des services exhaustifs à des prix très élevés, grâce précisément à la raréfaction constante des possibilité d'immigration légale en Europe.

Frontex est l'instrument de cette fermeture de l'Europe à l'immigration légale. Elle est donc, l'agence européenne, l'alliée des réseaux, des mafias, des milices qui exploitent l'émigration de désespoir, et l'immigration illégale. Dans le "Courrier" du 1er décembre, Jean Ziegler dénonce "Frontex, la honte de l'Europe". Cette honte est aussi celle de la Suisse, puisqu'elle finance cette agence, qui a besoin d'argent pour constituer dans les cinq ans un contingent de 10'000 agents et agentes.  Le référendum contre Frontex a besoin d'autant de signatures pour aboutir :
On signe ici jusqu'au 17 janvier : https://frontex-referendum.ch/fr/

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