Abolition du droit de timbre sur l'augmentation du capital des entreprises : Gros mensonge pour un gros cadeau

La droite n'a pas réussi à abolir "le droit de timbre" sur l'augmentation du capital des entreprises -abolition combattue par un référendum de la gauche, et qui, à été refusée par le peuple, malgré une campagne assez considérable pour tenter de le convaincre de finalement le maintenir. Une campagne qui n'hésitait pas à franchir le pas de la falsification : ainsi, l’Union suisse des arts et métiers présentait le droit de timbre comme un «impôt sur les PME». C'était un gros mensonge : à peine 0,3 % de l’ensemble des entreprises paient un droit de timbre. Et d'entre elles, 55 grosses sociétés financières, bancaires, d'assurance... Le droit de 1 % des augmentations de capital n'est prélevé que sur les montants supérieurs à un million (si une entreprise émet pour 1,5 million d'actions, elle ne paiera de droit de timbre que sur 500'000 francs, soit un droit de 5000 francs). De plus, les crédits et les emprunts n'y sont pas soumis, les entreprises à but non lucratif (les coopérative d'habitation, par exemple) non plus, ni les entreprises de transport dont les fonds propres proviennent du secteur public, ni, souvent, les entreprises qui ne cherchent des fonds propres que pour un assainissement de leur situation. On est donc loin, très loin, à des années lumière, d'un impôt confiscatoire. Ni d'ailleurs d'un impôt que la Suisse serait seule à percevoir : la Grèce et l'Espagne le perçoivent aussi. Et même le Liechtenstein, paradis fiscal et havre de sociétés-boîtes aux lettres...

Eviter la chute du premier de trois dominos fiscaux

Qui donc le paie, cet impôt sur l'augmentation du capital des entreprises,  que la droite voulait supprimer et la gauche maintenir ? en tout, en 2020, 2300 entreprises l'ont payé, mais la majorité (51,5 %) de son produit provenait seulement 55 d'entre elles (soit 2,2 % des entreprises contributrices). Ce sont ces sociétés-là, notamment les plus importantes du secteur financier, qui avaient tout à gagner à l'abolition d'un impôt (une taxe, en fait), abolition dont les collectivités publiques avaient beaucoup à perdre. Toutes les collectivités publiques, contrairement à ce qu'affirme la Confédération dans la brochure officielle de la votation, puisque la suppression de cette taxe permettait de faire rentrer du capital supplémentaire dans une entreprise sans que les caisses publiques en profitent, fût-ce marginalement, et en réduisant le bénéfice imposable de ces entreprises. Or ce bénéfice est imposé au profit de toutes les caisses publiques, de la fédérale aux communales en passant par les cantonales. S'il est réduit, ce sont toutes ces rentrées fiscales qui le sont.

La suppression du premier des droits de timbre que la droite prévoyait de supprimer (deux autres sont encore dans son collimateur) privait à elle seule la Confédération de 250 millions de francs de recettes par année. Ce quart de milliard de perdu n'aurait été  lui aussi, que le premier d'une série de trois si l'offensive de la droite arrivait à son terme. Le refus de la suppression du premier droit de timbre visé était le seul moyen d'éviter la chute des deux autres dominos. Et deux autres trous dans les caisses publique, au moment où la situation  économique et sociale impose de maintenir et renforcer les collectivités publiques comme actrices décisive avec comme critère le bien public, l'utilité publique des prestations qu'elles délivrent. Comment les financer, ces prestations ? De quel instrument la collectivité publique dispose-t-elle pour assurer ce financement ? De l'impôt. A quoi sert l'impôt ? A financer l'action publique et, s'agissant de l'impôt direct et progressif, à redistribuer les richesses. C'est à rendre impossible l'accomplissement de telles mission que servent des cadeaux fiscaux comme l'abolition des droits de timbre -et c'est pour rendre possible cet accomplissement qu'il fallait refuser cette abolition. Avant qu'il soit trop tard.

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