Deux ans de résidence de plus pour pouvoir s'inscrire sur une liste d'attente d'un logement social ?

Allez vous loger à Nyon ou Annemasse !

Entre les principales villes de Suisse, l'écart des loyers s'accroît, et désormais, pour louer un appartement de même type et de même surface, on paie deux fois plus à Genève qu'à Bienne ou Lugano : 3500 francs pour un quatre pièce et demi à Genève, 1700 francs à Lugano. Et le rapport est le même pour des appartements plus petits. Explication ? La crise du logement, c'est-à-dire une offre insuffisante de logements financièrement accessibles à la majorité de la population au regard de la demande croissante, vu que la population augmente. Du coup, les loyers augmentent à Genève et baissent à Lugano, où l'offre est suffisante. Et le climat plus agréable, soit dit en passant. Et où un Genevois n'est pas trop dépaysé, vu qu'il y a aussi un lac et une frontière. Et des frontaliers. Et donc un MCG (la Lega). Bref, on résume : le même logement coûte deux fois plus cher à Genève qu'à Lugano. Et c'est le moment qu'a choisi la droite genevoise, et une courte majorité du corps électoral actif pour accepter d'allonger le délai de résidence exigible pour pouvoir obtenir un logement subventionné, à loyer supportable. Ce sens de l'opportunité est ébouriffant. Mais explicable : la droite genevoise espère sans doute qu'on passe entre Genève et Lugano d'un écart de loyer du double à un écart du triple, avec le moins possible de logements sociaux, et la plus grosse part possible de loyers libres et de propriétés par étage. Quant à ceux qui ne pourront pas se loger, ils n'ont qu'à s'établir à Annemasse, devenir frontaliers suisses. La «Grande Genève» de la crise du logement, en somme.

Plus de précarité, plus de discriminations -mais pas plus de logements

La loi acceptée le 13 février à Genève est une sorte de cadeau stupidement accordé au MCG par le reste de la droite genevoise pour le lier à elle. Et ce n'est pas pour rien que l'Asloca, Caritas, le Centre social protestant, et même le Conseil d'Etat, s'y opposaient  : ces associations en mesuraient les effets possibles : plus de précarité, plus de discriminations -mais pas plus de logements. La loi ne répondait évidemment pas à la crise du logement, ne mettait aucun nouveau logement sur le "marché". Et contrairement au prétexte avancé pour la justifier, elle ne réduira même pas l'interminable liste (plus de 7000 demandes, dont près de la moitié de Suisses et un gros quart de permis C) d'attentes de logements sociaux : 80 % des demandeurs inscrits répondent déjà à la condition de durée de résidence posée par la loi èmecégiste (5 ans de résidence depuis huit ans) et les 20 % qui n'y répondent pas par manque de temps de résidence y reviendront le temps manquant passé. Par contre, elle éloignera plus encore de l'accession à un logement financièrement accessible la population genevoise la plus précaire, actuellement prioritaire dans l'attribution d'un logement : celle qui vit dans la rue, à l'hôtel, en foyer, en sous-location meublée, dans des logements insalubres ou sur son lieu de travail, qui verra sa situation aggravée et le coût de sa prise en charge alourdi, pendant que es Genevois qui ont été contraints de quitter Genève faute de logement, et qui voudraient y revenir attendront  deux ans de plus-il en sera de même des Confédérés (notamment des jeunes formés dans d'autres cantons) désireux de s'établir à Genève. Vous êtes allés vous établir à Nyon faute de pouvoir rester à Genève ? Restez à Nyon !

Le droit au logement est un droit social fondamental. Il est donc garanti comme tel par la Constitution genevoise. Garanti en principe. Mais en réalité ? en réalité, la crise du logement sévit, et c'est une crise de l'offre : il y a beaucoup trop peu de logements disponibles pour beaucoup trop de demandes : un taux de vacance de 0,49 % (le plus bas de Suisse), c'est un taux de crise. Et ce qui manque le plus, ce sont les logements sociaux et à loyers contrôlés, les HBM, ls HLM, les HM. Des logements "réservés aux personnes ayant un revenu faible et nécessitant des aides de l'Etat", selon la députée PLR Diane Barbier-Muller. Des logements pour la plèbe, en somme. Sauf qu'on peut obtenir un HM avec un revenu de 100'000 balles par an, plein pot dans la fameuse "classe moyenne"... Mais 100'000 francs de revenu par an, ce doit encore être plébéien, quand on s'appelle Barbier-Muller...

"Le bon sens voudrait qu'on favorise l'accès aux logements sociaux plutôt que de le durcir", soupire le secrétaire général du Rassemblement pour une politique sociale du logement, mais le "bon sens" est bien la chose la plus étrangère à la loi acceptée par les votants et votants (sauf en Ville de Genève et à Carouge). 



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