Présidentielle française : 33 % d'intentions de vote pour l'extrême-droite

Tiers-Etat d'âme

Candidat sans l'être officiellement mais tout en l'étant réellement, Macron survole les intentions de vote (si l'élection avait lieu au moment où se fait le sondage qui les évalue) à la présidentielle de dans quelques semaines. Le dernier sondage, paru hier, lui accorde 25,5 % d'intentions de vote, loin devant Martine Le Pen (17,5 %), Eric Zemmour (15 %), Valérie Pécresse (14,5 %) et Jean-Luc Mélenchon (11,5 %). Le seuil pour se retrouver au deuxième tour de cette élection cardinale du système français n'aura jamais été aussi bas. Quant à la gauche, ses candidates et candidats, Mélenchon mis à par, sont à la ramasse, en particulier la candidate socialiste, Anne Hidalgo,à propos de laquelle on se demande quand son propre parti admettra l'inutilité, et même la nocivité de la version électorale de l'acharnement thérapeutique, puisque qu'elle e traîne à 2 %, derrière Christiane Taubira (qui échoue dans sa tentative de se présenter comme une "solution unitaire") et le candidat du PC, Fabien Roussel, qui, à défaut de représenter une chance pour la gauche d'être au second tour de la présidentielle, a au moins réinstallé le PCF dans le paysage politique français. Ce serait d'ailleurs la première fois depuis 1969 qu'un candidat communiste obtienne plus de suffrage qu'un.e candidat socialiste... Roussel ne fera certainement pas aussi bien que Duclos, mais Hidalgo fera encore pire que Defferre. Quant à l'extrême-droite, ses deux candidatures confondues (on s'abstiendra même d'y ajouter celles, anecdotiques et pas certaines, faute de parrainages, d'être validées de Dupont-Aignan et de Phillipot), elle n'aura jamais été aussi forte avant un premier tour depuis la présidentielle de 1965, où elle était représentée pat Tixier-Vignancourt. : dans les sondages, elle en est à 33 % des intentions de vote. Sans doute ces intentions ne sont-elles pas des engagements, et les sondages ne sont-ils pas l'élection, mais tout de même, ce Tiers-Etat d'âme, s'il n'est pas tout, n'est pas rien, et arrive à être quelque chose...

La "droite de la droite française" : à Vichy en passant par Coblence ou à Coblence en passant par Vichy ?

Devant la presse étrangère, Marine Le Pen a exprimé son espoir de gagner la présidentielle, face à Macron, et d'être, pour cette revanche de la présidentielle de 2017, "la candidate du peuple", en concurrence à droite (et à l'extrême-droite) avec un "candidat des plateaux de télévision" (Zemmour) et "une candidate des grandes métropoles" (Pécresse),. Elle se dit persuadée n'avoir jamais eu "un réservoir de voix aussi important" si elle accède au second tour (ce qui est encore loin d'être garanti, puisque Zemmour l'affaiblit), qu'"il n'y aura pas de front républicain pour venir sauver" Macron et qu'"une très grande partie de la gauche s'abstiendra". Le Pen a au moins fort bien perçu le but réel de Zemmour : casser le Rassemblement National pour construire à sa place une illusoire "union des droites" incluant l'extrême-droite, et dans laquelle on voit mal ce que viendrait faire la droite libérale et le centre-droit démocrate-chrétien, aux côtés d'un homme qui se réclame de De Gaulle en s'appuyant sur les héritiers de ceux qui tentèrent de l'assassiner (les nostalgiques de l'Algérie française et de l'OAS) et en cultivant la nostalgie d'un régime (Vichy) qui le condamna à mort... A-t-elle aussi bien perçu le but de Macron : se retrouver au deuxième tour face à elle, ou, mieux encore, face à Zemmour ? c'est, pour lui, la meilleure des garanties d'une réelection, qui serait un peu moins aisée face à Pécresse. Ni Le Pen ni Macron ne cherchent à convaincre l'électorat de l'autre, l'une et l'autre ne cherchant qu'à attirer la plus grande part possible de l'électorat de la droite traditionnelle.

Quant à la gauche, c'est la question de sa reconstruction qui se pose, et à laquelle la présidentielle ne donnera aucune réponse. Car c'est de la reconstruction de la gauche comme une force nationale dont il s'agit, puisque si elle domine encore dans toutes les grandes villes, elle tend à ne plus dominer que là : dans ses vieilles terres d'ancrage du sud-ouest et du nord, et les plus récentes  de Bretagne, elle n'est plus guère qu'un réseau d'élus sans grande base militante (ela vaut surtout pour le PS). Avec cela, on peut gagner des élections municipales, départementales, régionales -mais une élection nationale au suffrage universel et à circonscription unique est hors de portée.

La "droite de la droite" (droite ultra-conservatrice, droit réactionnaire, extrême-droite...) n'a certes jamais paru si forte en France, mais c'est peut-être un trompe- l'oeil. Forte, elle l'est dans les intentions de vote pour la présidentielle, mais tout ce qu'elle exècre est majoritaire, parfois largement, dans l'opinion publique, du "mariage pour tous" à l'IVG, en passant par les grandes conquêtes de la gauche française, de la Sécurité Sociale au salaire minimum... Reste à cette "droite de la droite" ce qui l'a toujours constitué : outre les mythes d'une histoire falsifiée et reconstruite, la xénophobie, voire le racisme. Vichy, toujours. En passant par Coblence. Ou à Coblence en passant par Vichy. 

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