Fonds de tiroir
Nul n'ignore plus qu'à Genève, pendant deux ans, du printemps 2019 au printemps 2021, des violences et des maltraitances ont été perpétrées sur des enfants vulnérables, placés dans un foyer public placé sous la surveillance de l'Etat (l'Office médico-pédagogique, en l'occurrence, le foyer de Manc. La situation était telle, l'équipe à tel point dépassée par les troubles des pensionnaires qu'elle finissait par n'y plus répondre qu'en recourant à des mesures disciplinaires, ou à des «hospitalisations sociales» à l'Hôpi-tal cantonal, jusqu'à trois fois par semaine, pour pallier aux défail-lances du foyer. Hospitalisations que le PLR a décidé de faire interdire, en faisant voter par le Grand Conseil un projet de loi en ce sens. C'est vrai que c'est plus facile que de donner des moyens, notamment humains (des engagements de per-sonnel, pour être clairs) aux foyers et aux services de tutelle. Le même parti qui veut interdire les hospi-talisation d'urgence avait refusé des crédits complémentaires décidés à les limiter. Et refusé le budget 2022 du canton qui donnait les moyens qui manquent à une prise en charge cor-recte. Mais qui attend, à un an des élections cantonales, de la cohérence du groupe PLR au Grand Conseil ? Même pas le PLR, sans doute...
Le Conseil fédéral est favorable à la gratuité des transports publics, les entreprises de transports publics réunies dans «Alliance SwissPass» aussi. Vous en doutez ? Vous avez tort, c'est officiel : des abonnements généraux «solidaires» pour les trans-ports publics pourraient être remis. Aux réfugiés ukrainiens. C'est bien, ils en ont besoin. Mais pourquoi faut-il une guerre et des milliers de réfugiés pour concevoir la possibilité de la gratuité des transports publics, fût-ce pour ces seul.e.s bénéficiaires ? L'art. 81a.2 de la Constitution fédérale stipule que «les prix payés par les usagers des transports publics couv-rent une part appropriée des coûts». Cet article sert d'argument contre la gratuité des transports publics. Or leurs usagers sont aussi des contri-buables. Et en tant que contribuables, ils paient déjà leur transport, par leurs impôts, puisque les transports publics sont essentiellement soutenus par les budgets publics...
Le Directeur artistique (le chef, quoi) de l'Orchestre de la
Suisse Romande (OSR), qui est quelque chose comme l'Orchestre
philharmonique de Genève vu qu'il n'existe que parce que la
Ville et le canton de Genève le financent, gagne donc 550'000
francs par an. Quelque chose comme huit fois le salaire moyen du
coin. Jonathan Nott touche d'abord 150'000 francs de fixe par
saison. Puis 28'000 francs par concert unique, 46'000 francs
pour deux concerts au même programme, puis 12'500 francs par
concert supplémentaire, plus 52'500 francs pour son logement,
plus quelques cachets (pour les retrans-missions de concerts,
par exemple). Comme il est en plus directeur musical de
l'Orchestre Sympho-nique de Tokyo, on ne se fait pas trop de
mouron pour ses fins de mois, même si d'autres chefs
d'or-chestres gagnent encore plus (comme ceux des orchestres de
Chicago, de Los Angeles, de Londres, dont les rémunérations se
comptent en millions de francs). Le problème, c'est que,
contrairement aux orchestres américains ou britan-niques, qui
sont financés par des mécènes ou des sponsors, l'OSR, comme la
plupart des grands orchestres européens, est essentiel-lement
financé par des fonds publics (à raison des deux tiers de son
budget de 27 millions), accordés paritairement par la Ville et
le canton. Or comme l'OSR est une fondation privée, il se
considère comme en droit de ne pas révéler la rémunération de
son chef, et il aura fallu une «fuite» d'un rapport du Contrôle
financier de la Ville pour qu'on l'apprenne. Du coup, ça râle
sec à gauche : on veut bien payer pour avoir un bon orchestre
(et il est bon) et un bon chef d'orchestre (et il est bon), mais
on veut aussi savoir à quoi est affecté ce qu'on paie, et
combien on paie le chef (parce que les musiciens, eux, on sait
ce qu'ils gagnent). A droite, le salaire du chef ne pose aucun
prob-lème : y'a un mercato des maestri comme y'en a un des
footeux, c'est comme ça. «Mercato», ça veut dire, en bon
français, «marché». Ce qui s'échange sur un marché, ça
s'ap-pelle une marchandise. Alors, les chefs, ça vous fait quoi,
d'être considérés comme des marchan-dises ? De grosses
savonnettes ?
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