Le référendum contre AVS 21 a largement abouti : Debout, les damnées de la retraite !
Le référendum contre la (contre)réforme de l'AVS (AVS21) et le report d'un an de l'âge de la retraite des femmes a largement abouti, avec plus de 151'000 signatures, déposées à la Chancellerie fédérale hier, récoltées par un large front des syndicats, des partis de gauche, de la Grève féministe, de la Grève du climat, de l'Avivo (et on en passe). Le votation fédérale devrait inbtervenir en septembre prochain. On a donc six mois de campagne devant nous. Intensive, la campagne. Debout, les damnées de la retraite !
https://www.rentes-des-femmes.ch/
Il faut laisser du temps au temps, certes. Mais pas trop quand même.
AVS21, c'est, au prétexte d'une économie de sept
milliards de francs d'ici 2030, une perte de 1200 francs de
rente par année pour les femmes (et seulement pour les femmes)
alors que leur rente n'atteint déjà aujourd'hui, en moyenne, que
63 % de celle des hommes, du fait de parcours professionnels
moins rectilignes, avec des congés maternité, des arrêts de
travail après la naissance(la majorité de droite refuse toujours
de renforcer l'interdiction de licenciement au retour du congé
maternité), des temps partiels non choisis plus fréquents (dus
notamment à l'inégalité de la répartition des charges de travail
dans le ménage), des salaires plus bas de 19 %, un poids de
l'AVS plus grand et des deuxième et troisième piliers plus
faible dans la constitution du revenu de retraite (45 % des
femmes ne disposent d'aucun deuxième pilier alors que cette
proportion n'est que de 22 % pour les hommes). Sur trois
rentiers AVS ayant besoin de prestations complémentaires pour
disposer d'un revenu suffisant pour vivre, deux sont des
rentières...
Et puis, repousser l'âge donnant droit à la
retraite, quand on sait quelles difficultés les "seniors"
rencontrent pour retrouver un emploi quand ils ont perdu le
leur, a quelque chose d'absurde, et même de socialement
irresponsable. Repousser l'âge de la retraite
des femmes ne créera aucun poste de travail en situation de
chômage -au contraire, des postes qui sont repourvus quand
leur titulaire part à la retraite le seront plus tard : une
année de plus à attendre la retraite, cela fait des dégâts sur
l'emploi, le revenu, le pouvoir d'achat (et la capacité
financière de consommation). sur une espérance de vie en bonne
santé de 71 ans (c'est celle des femmes), une année de plus
sans droit à la retraite, ça compte ! Surtout quand les femmes
assument la plus grande partie du travail non rémunéré
(notamment d'éducation et de soins aux proches) : en
2018, un tiers des femmes de 58 à 64 ans étaient considérées
comme inactives pour raisons "personnelles" -dont souvent la
garde des petits-enfants, qui permet aux collectivités publiques
d'économiser des centaines de millions, peut-être plusieurs
milliards de francs, d'investissements dans des places de
crèches.
On se souvient du grand mouvement en France, fin
2019 début 2020, contre la réforme du système de retraite
envisagée par le président Macron, qui l'avait contraint à la
repousser. Ce fut le plus long conflit social depuis Mai 1968,
même s'il fut bien plus prégnant dans le secteur public
(notamment les transports publics) que dans le privé, où la
capacité de mobilisation syndicale a été considérablement
amoindrie par le développement de la sous-traitance et de
l'individualisation des rapports salariaux. Les syndicats
étaient eux-mêmes divisés, moins sur le fond que sur la
stratégie à adopter face au projet macronien d'instaurer un
régime de retraite unique et par points : la CGT, FO, Sud, ont
privilégié la mobilisation dans la rue et par la grève, la CFDT,
la CFTC et Unsa la négociation avec le gouvernement, qui leur
avait donné un premier gage en retirant l'un des points de la
réforme, l'instauration d'un "âge pivot" de retraite à 64 ans,
avec des retraites réduites pour celles et ceux qui la
prendraient avant. On ne fait pas grève
en Suisse pour défendre le système de retraite (on l'avait
cependant fait en 1918 pour l'instaurer...), comme on le fait en
France : on lance un référendum. Et pour améliorer le système de
retraite (il en a besoin : une.e retraité.,e.s sur sept vis en
dessous du seuil de pauvreté, alors que l'AVS doit, selon la Constitution, couvrir les
besoins vitaux des rentiers et des rentières ), on
lance une initiative. Toutes celles lancées par la gauche
politique et syndicale n'aboutissent pas, mais toutes
s'inscrivent dans la même volonté de renforcer l'AVS en
améliorant ses prestations.
Le 25 septembre 2016, l'initiative de l'Union Syndicale "AVS Plus" était refusée par le peuple (et les cantons) : elle proposait une augmentation de 10 % des rentes du premier pilier. Pour récompenser le peuple de ce refus, on a augmenté les rentes de 10 francs (20 francs pour les rentes maximales)... Mais l'Union Syndicale et le Parti socialiste n'allaient pas se contenter de cette aumône, et ont lancé une nouvelle initiative, pour une 13e rente (ce qui équivaut à une augmentation de 8,5 % de la rente annuelle), dont bénéficieront surtout les personnes à bas et moyen revenu, et plus précisément encore, celles (surtout) et ceux qui ne disposent pas d'une rente LPP (ou seulement d'une rente LPP ridicule). Une initiative de l'Union Syndicale propose de faire également contribuer la Banque nationale au financement de l'AVS, en la contraignant à lui redistribuer chaque année une part de son bénéfice supplémentaire à celle qu'elle redistribue déjà à la Confédération et aux cantons.
Reste la piste d'une réforme profonde de tout le système, en fusionnant ses deux piliers obligatoires, l'AVS et la Prévoyance professionnelle. Des projets allant dans ce sens sont, à gauche, à l'étude depuis des années. Il serait temps d'en accoucher, sous la forme d'une initiative populaire. Elle aboutirait certainement, elle aurait certainement du mal à être acceptée par la double majorité du peuple et les cantons, mais c'est le sort de tous les projets de réforme fondamentale dans ce pays : l'octroi des droits politiques aux femmes a été revendiqué pour la première fois par un mouvement national en 1918, par le cahier de revendication de la Grève Générale : il faudra un demi-siècle et des dizaines d'initiatives populaires cantonales et fédérales pour que cette revendication soit satisfaite.
Il faut laisser du temps au temps, certes. Mais pas trop quand même. Et en lui en laissant, il faut le meubler d'avancées, et de résistances. Le refus d'AVS21 est une de ces étapes essentielles. Franchissons-la !
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