La Romandie, les villes, le cinéma...

 

Les plate-formes de streaming contribueront au financement du cinéma suisse

La "loi Netflix" a été nettement acceptée, au-delà de sondages qui prédisaient un résultat bien plus serré que les plus de 58 % de voix qu'elle a obtenue au plan fédéral, et a obtenu une majorité dans 18 cantons sur 25 (avec toutefois une opposition plus forte en Alémanie qu'en Romandie, où tous les cantons acceptent la loi, et plus forte dans les campagnes que dans les villes). Dès janvier 2024, les plate-formes de streaming devront donc réinvestir dans le cinéma (et les séries) suisses 4 % du chiffre d'affaire qu'elles réalisent en Suisse, faute de quoi une taxe équivalente leur sera imposée, qui elle aussi servira à financer la création audiovisuelle helvétique. Et elles devront également proposer dans leur catalogue au moins 30 % de films européens (les films suisses étant réputés européens...).


Le combat pour le soutien public à la culture ne va pas cesser

Une majorité de l'électorat actif (toutes les classes d'âge ayant produit un vote positif, même si les jeunes, plus utilisateurs de streaming que les aînés, n'ont été que 51 % à voter "oui") a donc accepté d'introduire une taxation du chiffre d'affaire des plate-forme de streaming. Ce ne sont pas des sommes gigantesques qui sont en jeu (le cinéma suisse devrait y gagner entre 18 et 25 millions de francs par an, soit le coût d'un ou deux films ou de trois ou quatre séries), mais c'est un bon signe de soutien à la culture, et c'est, comme le redoutent les opposants à cette loi, et comme nous le souhaitons, un précédent : "C'est la première fois que le soutien à la culture gagne une votation populaire", souriait dimanche dernier le réalisateur Denis Rabaglia. On n'a pas vérifié s'il avait raison, mais on partage son sourire.

Avec la "loi Netflix", il s'agissait certes d'accroître le soutien financier à la production cinématographique suisse, Il s'agissait aussi de mettre le soutien au cinéma national suisse au niveau, non pas quantitatif mais au moins dans son financement, de celui que reçoivent les cinémas nationaux de nos principaux voisins. Et puis de soutenir un secteur culturel qui est aussi un secteur économique : La Fondation romande pour le cinéma, Cinéforum, rappelait que chaque franc investi dans la production cinématographique en Suisse en rapportait trois dans l'économie suisse (nationale et locale). Sans doute peut-on d'ailleurs en dire autant de tout investissement culturel public.

Quant aux arguments des opposants à la loi, ils semblent n'avoir guère porter au-delà du PLR et de l'UDC, dont les électorats ont refusé la loi, à 51 et 73 %, et semblent avoir surtout porté hors des villes. C'est-à-dire là où les salles de cinéma sont les plus rares. L'argument selon lequel la proposition était contradictoire du principe du libre choix du consommateur a fait un flop assez sonore :  inciter une plate-forme de streaming d'investir dans le cinéma suisse, et d'élargir son offre à des productions de ce cinéma, ne prive en effet personne ne rien : c'est un élargissement de l'offre, pas un quota qui réduirait l'offre d'autres cinémas.

Cela posé, le bon résultat de la "loi Netflix" ne doit pas faire oublier que d'autres enjeux restent à relever, puisqu'à droite, et à la droite de la droite, le combat contre le soutien public à la culture ne va pas cesser -et donc notre propre combat pour ce soutien non plus, et que ces combats contradictoires vont aussi se mener pour ou contre le soutien aux media, et en particulier aux media publics -la SSR, pour être précis.

Nous ne sommes en effet pas de ceux qui, quand ils entendent le mot de "culture", sortent leur calculette. 

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