Fonds de tiroir

La coalition pour des multinatio-nales responsables a déposé jeudi dernier 217 509 signatures, récoltées en cent jours, au bas de sa pétition en faveur d’une loi efficace sur la responsabilité des multinationales. Pour  l'ancien Procureur général du Tessin et ancien Sénateur PLR (eh oui...), Dick Marty, s'exprimant au nom de la coalition, «L’écho énorme rencontré par la pétition montre clairement que la population ne veut pas que la Suisse devienne bientôt le seul pays d’Europe sans responsabilité des multinationales». La pétition rappelle au Conseil fédéral sa promesse faite lors de la campagne de votation : suivre le rythme des évolutions internatio-nales. Or l'Union européenne va se doter d'une loi qui impose aux multinationales d'assumer leurs responsabilités dans le respect des droits humains et de l'environ-nement, et dans leurs violations par elles ou leurs filiales. Or la conseillère fédérale Keller-Sutter a déjà laissé entendre dans les média qu’elle voulait retarder le processus d'adoption par la Suisse d'une loi portant les mêmes exigences : «la bataille seta encore longue», conclut Dick Marty. Mais 217'509 personnes ont affirmé leur volonté de la mener jusqu'au bout.

Le Parti socialiste suisse a donc refusé un don de 17'000 balles des pharmas, qui l'offrent à tous les partis nationaux (les autres, même les Verts, l'ont accepté). En revanche, le parti présente, sur son «ticket» pour la succession de Simonetta Sommaruga au Conseil fédéral, une candidate bâloise, Eva Herzog, favorite de l'élection, qui s'est notamment illustrée en défendant les intérêts des pharmas bâloises, contre la position du groupe socialiste. Bref, le parti refuse les dons de la pharma, mais pas de leur faire don, le cas échéant, d'une conseillère fédérale. C'est tout nous, ça : altruistes et désintéressés.

«Le Matin Dimanche» de dimanche a fait ses pronostics pour l'élection au Conseil fédéral de mercredi : il faudrait parier sur Albert Rösti (75% de chances d'être élu) et Eva Herzog (67%), plutôt que sur Hans-Ueli Vogt (25%) et Elisabeth Baume-Schneider (33%). Albert Rösti serait le candidat préféré de l'UDC (malgré la cam-pagne de la «Weltwoche» bloché-rienne contre lui) , du Centre et du PLR, alors qu'au sein du PS et des Verts des parlementaires qui lui reprochent d'être un lobbyste du pétrole et ont envie d'emmerder l'UDC «poussent» Vogt. S'agissant des candidates socialistes, Eva Herzog serait la candidate préférée du PLR, les socialistes seraient partagés entre elle et Elisabeth Baume-Schneider, qui serait la préférée des Verts et du Centre, et du groupe (interparti) paysan. Bon, ben voila, vous saurez ce matin si les pronostics du «Matin Dimanche» étaient justes. ça vous consolera peut-être de la fausseté de ceux de la quasi totalité de la presse suisse sur les chances de battre le Portugal à la fête qatarie de ballopied.

On n'a pas encore fini d'en parler, des casseroles... euh non, pardon, des mandats privés du candidat UDC au Conseil fédéral Albert Rösti : fin novembre, des scientifiques (comme la climatologue Martine Rebetez), des intellectuels (comme l'écono-miste Julia Steinberger et le philo-sophe Dominique Bourg) et des activistes climatiques ont lancé un appel «Non au lobby du pétrole au Conseil fédéral», rappelant les mandats de Rösti à la tête des lobbies du pétrole (Swissoil) pendant sept ans et de la bagnole (Auto Suisse) depuis sept mois. Les signataires de l'appel notent que l'UDC est le principal acteur politique du climato-scepticisme, et rappellent qu'il avait lancé le référendum contre la loi CO2 et qu'il s'oppose à un contre-projet à l'«initiative des glaciers». Rösti, lui, la joue prudent : il a retiré de son site personnel la référence à son mandat à la tête du lobby des combustibles, n'a jamais voulu rendre publics les revenus de ses mandats (il en a seize rémunérés, ce qui en fait l'un des trois parlemen-taires qui en détient le plus). La gauche rappelle par ailleurs que Vogt, qui a les faveurs du clan blochérien, était à l'origine d'une initiative populaire, heureusement refusée par le peuple, qui entendait soustraire la Suisse à l'exigence de respect du droit international quand elle est formulée par des «juges étrangers» -entendez, par exemple, la Cour européenne des droits de l'homme (une institution du Conseil de l'Europe, dont la Suisse est membre). Bref, résume le Conseiller national Christian Dandrès (socialiste genevois), Rösti «est aussi redoutable que Christoph Blocher, mais en plus habile». Et en plus sympathique, aussi, ce qui ne le rend pas moins dangereux. Au contraire.

L'organisateur de la morte-née Fan Zone de Genève avait annoncé que «si la Suisse allait en quart de finale» du Mondial, il en reproposerait une, de Fan Zone. Ah ben quand ça veut pas, ça veut pas, hein... N'empêche, on est bien contents: outre une légère schadenfreude devant les images des supporters déprimés, on est empreint de gratitude à l'égard de l'équipe portugaise. Parce que finalement, grâce à elle, la Suisse elle le boycottera, le Mondial qatari de ballopied...

Juste avant de céder sa place au Conseil fédéral à Albert Rösti, Ueli Maurer s'est offert une petite virée au Qatar. Une nouvelle petite virée, il y était déjà allé en mars, pour causer du gaz avec les gaziers de l'émirat. Albert Rösti, lobbyste de l'automobile et du pétrole s'y senti-rait (et probablement s'y sentira) fort bien au Qatar : c'est le paradis des SUV et un gros producteur de sources d'énergie fossiles. Bon, bref, Ueli Maurer a fait un saut au Qatar, à l'invitation de la FIFA, histoire de féliciter le Qatar pour l'organisation du Mondial et assister au match Suisse-Brésil. Un match que la Suisse a perdu, mais Maurer n'y est pour rien. Le match suivant, contre la Serbie, la Suisse l'a gagné. Mais Maurer n'y est non plus pour rien. Et nous, dans tout ça ? Ben, on a fait changer notre billet d'avion pour Belgrade en billet d'avion pour Lisbonne. Parce que c'est pas parce que les Serbes ont été infoutus de nous débarrasser des supporters qu'il faut désespérer des Portugais.

La «Tribune de Genève» (et sans doute aussi «24 Heures»...) nous l'assurent (pour nous rassurer ?), «Hans-Ueli Vogt a encore des chances face à Albert Rösti» pour la désignation du successeur UDC d'Ueli Maurer, Et pourquoi il a encore ses chances, Vogt ? D'abord parce qu'il est Zurichois. Ensuite, parce que Rösti est trop marqué pro-bagnole et pro-nucléaire, ce qui évidemment l'éloigne de la gauche («Si quelqu'un qui représente le lobby du pétrole, du nucléaire et de l'automobile prenait la direction du DETEC (Département de l'énergie et de l'environnement, actuellement dirigé par la socialiste Simonetta Sommaruga), ce serait une petite catastrophe». On mesure mal ce que peut-être une «petite» catastrophe, mais on voit bien ce que veut dire par là la Verte Nathalie Imboden. En revanche, on voit mal où trouver un UDC qui représenterait le lobby du solaire, du vélo et des économies d'énergie. Mais on cherche encore. Et c'est pas du côté de l'autre candidat UDC au Conseil fédéral, Hans Ueli Vogt, qu'on trouvera : totalement aligné il est sur les fondamentaux de son parti, le Zurichois : xénophobie, europhobie, souverainisme, tout ça. Et c'est pas parce qu'il est homosexuel assumé, favorable à la décriminalisation des drogues douces et au mariage pour tous qu'il est moins UDC que Rösti. La candidature de Vogt, c'est juste la candidature de Charybde contre celle de Scylla. Ou de la grippe contre l'otite.

La Suède veut entrer dans l'OTAN (la Finlande aussi...). Mais il lui faut l'autorisation de tous les autres membres de l'OTAN. La Turquie est membre de l'OTAN. Et elle veut faire payer son Nihil Obstat à la Suède. A quel prix ? celui de l'expulsion de requérants d'asile kurdes, suspectés d'être membres ou sympathisants du Parti des Travailleurs du Kurdistan, le PKK, considéré comme une organi-sation «terroriste» par le pouvoir turc, qui mène contre les Kurdes (et pas seulement ceux du PKK) une guerre impitoyable, politique et militaire. A la faveur d'un changement de gouvernement et de l'arrivée au pouvoir de la droite, soutenue par l'extrême-droite, la Suède a commencé à payer son ticket d'entrée dans l'OTAN en renvoyant en Turquie un membre du PKK, que la Turquie a immédiatement arrêté et emprisonné. En félicitant la Suède. Comment résumer tout ça autrement, en suédois dans le texte,  que par «det stinker» ?



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