Séquences gouvernementales helvétiques
Ainsi font, font, font...
On a eu la saison "élection au Conseil fédéral".
Suivie de la saison "répartition des dicastères". On est
maintenant entré dans la saison la plus longue (elle risque de
nous prendre des années) : Quel Conseiller fédéral, quelle
Conseillère fédérale, va démissionner en premier ? Saison qui
sera suivie d'une reprise des deux premières : qui va remplacer
le ou la démissionnaire, et pour se retrouver à la tête de quel
département. Suspense ? tout dépendra en fait du résultat des
élections fédérales : actuellement, le parti le plus
sur-représenté au Conseil fédéral est le PLR -ce serait donc le
siège d'Ignazio Cassis qui serait celui du "latin de trop" -mais
la Suisse italophone, alors, ne serait plus représentée... Si le
PLR arrive à dépasser le PS (en suffrages lors de l'élection à
la proportionnelle du Conseil national), c'est le PS qui serait
alors surreprésenté, et c'est le siège d'Alain Berset, doyen du
gouvernement, qui serait surnuméraire. Au sens de la "formule
magique", si peu "magique" qu'elle soit, les deux sièges de
l'UDC lui sont garantis (à moins d'un effondrement peu
probable), mais pas le maintien de Guy Parmelin sur le sien : il
est Romand, agrarien et ancien en poste, et les blochériens
zurichois piaffent... Enfin, le siège du Centre est contestable
(les Verts ont fait mieux que le PDC lors des dernière élections
fédérales et les Verts libéraux sont en progression). Ainsi
font, font, font les formules magiques...
La politique n'est pas un pince-fesse mondain, c'est un champ de rapports de force
Notre "impression est que la répartition des départements ne s'est pas faite uniquement dans l'intérêt du pays", contrairement à ce qu'à "affirmé le président de la Confédération Igniazio Cassis" : c'est, après la réparzition des ministères entre les différents membres du Conseil fédéral, le constat qu'en tire le président du Centre (le PDC), Gerhard Pfister, dont la Conseillère fédérale s'accroche à son département militaire et laisse celui de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication à l'UDC et à Albert Rösti. La répartition des départements du Conseil fédéral, "c'est un passage en force du PLR et de l'UDC", dénonce la sénatrice verte genevoise Lisa Mazzone. Un passage en force qui met "en péril les progrès réalisés par Simonetta Sommaruga en matière de sécurité de l'approvisionnement et de service public", ponctue le PS. Qu'à sa manière l'UDC confirme : "ce changement met enfin un terme à l'aveuglement dans la politique énergétique, marquée par une idéologie de gauche rose-verte totalement irresponsable". L'élection d'Albert Rösti n'est évidemment pas une bonne nouvelle. Et moins encore celle de sa conquête du Département de l'environnement et des transports : le lobbyste en chef du pétrole et de la bagnole sera en charge du pilotage de la transition énergétique et climatique. "Nos pires craintes se son t réalisées : le baron du pétrole s'empare de l'environnement" résument les Verts. Mais c'est moins la personne du BernerRösti qui est ici en cause (même si, pour la Grève du Climat, sa nomination est "catastrophique"), que le système de la "concordance" entre partis gouvernementaux. Et donc du choix des socialistes (et de la tentation des Verts) d'y prendre part...
La droite majoritaire au parlement fédéral et au
Conseil fédéral a-t-elle, comme
semble le croire la gauche, franchi les limites de la
bienséance politique en imposant une répartition des ministères
lui donnant les clefs des deux départements les plus
stratégiques du gouvernement, celui des Finances et celui de
l'Energie, des transports, de l'environnement et des
communications ? Cette répartition est certes navrante, mais
elle est surtout logique : on ne voit pas pourquoi une majorité
politique devrait se priver d'user du pouvoir que lui donne
précisément le fait d'être majoritaire et la droite suisse faire
à la gauche le cadeau de ministères essentiels. Quand un camp
politique est majoritaire, il use de cette majorité. La gauche
ne fait elle-même pas autre chose là où, et quand, elle se
trouve majoritaire : dans les principales villes du pays, par
exemple. Elle ferait mieux de renforcer les majorités dont elle
dispose et d'essayer d'en conquérir d'autres plutôt que de
s'emparer de la viole de gambe de Monsieur de Sainte-Colombe
pour pleurer sur les choix de la droite. La gauche ne peut pas
contrarier la répartition des ministères d'un gouvernement
fédéral auquel elle a décidé de participer en sachant qu'elle ne
le dominerait pas, mais elle peut au moins tenter de se
renforcer au parlement, de renforcer la capacité des villes de
peser sur les décisions fédérales et de leur donner une
représentation spécifique au sein de l'une des deux chambres du
parlement. Elle devrait surtout se donner pour objectif de se
renforcer au sein du peuple, dans un système politique qui lui
donne le pouvoir de renverser des décisions du parlement : il
n'est pas fatal que la gauche, dans ce pays, ne pèse qu'entre un
quart et un tiers des suffrages aux élections fédérales, et des
sièges aux Chambres, alors qu'elle peut être majoritaire dans
les urnes référendaires. La gauche doit se renforcer, et on ne
se renforce pas en se posant en victime de la force des autres
mais en usant de la force qu'on peut avoir.
La politique n'est pas un pince-fesse mondain, c'est un champ de rapports de force. On ne s'y passe pas la moutarde en échange du séné, on s'y affronte, on s'y combat, on peut y perdre, mais on n'est certain d'y perdre que si on se refuse à y combattre.
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