Dernière semaine de campagne électorale à Genève : Bataille d'oreillers ?
Dimanche, à Genève, sera élu le nouveau parlement cantonal, et on aura bouclé le premier tour de l'élection du Conseil d'Etat. Et, n'y voyez aucune malice mais seulement une coïncidence égayante, ce sera aussi la journée mondiale de bataille d'oreillers. Ceux sur lesquels se seront vraisemblablement paisiblement endormis la majorité des électeurs et des électrices de la République. Une campagne électorale s'achèvera donc -et on ne peut pas dire qu'elle aura passionné les foules. Lundi soir, la participation dépassait à peine les 10 %, et moins de 30'000 électrices et électeurs avaient fait usage de leur droit d'élire, ce qui laisse présager d'une participation finale se situant entre 35 et 40 % (et donc, puisque c'est un jeu à somme nulle, d'une abstention se situant entre 60 et 65 %). On lit dans la brochure officielle d'explication accompagnant l'envoi des bulletins de vote pour les élections cantonales, ceci : "les présentes élections permettent de désigner les personnes qui représenteront au iveau cantonal l'ensemble des citoyennes et des citoyens au sein du Grand Conseil et du Conseil d'Etat". Mais on lit dans le "Contrat Social" du Citoyen de Genève, ceci, à quoi nous nous tenons: "Les députés du peuple ne sont (...) ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que ses commissaires". Candidates et candidats au Grand Conseil, nous ne seront pas si nous sommes élus les représentants du peuple, de la classe ouvrière, du prolétariat, -seulement ceux de notre électorat : c'est le lot des élections à la proportionnelle. Et les mieux élues, les mieux élus d'entre nous ne le seront que par une minorité d'une minorité d'une minorité : la majorité de la population du canton n'a pas le droit de vote, la majorité de celles et ceux qui ont le droit de vote ne l'utiliseront pas, et aucun parti, aucune candidate, aucun candidat au Grand Conseil n'obtiendra vraisemblablement plus d'un tiers des suffrages. Nous, sur la liste socialiste, pas plus que les autres.
Il y a pire que le bruit des bottes : il y a le silence des pantoufles...
Nous sommes donc candidates et candidats au Grand
Conseil. Pourquoi ? (l'auteur de ces lignes ne parlera pas ici
pour les autres, seulement pour lui). Etre candidat au Grand
Conseil, cela ne devrait
pas s'inscrire dans un plan de carrière -il est d'ailleurs
bien trop tard tard pour que pareille trivialité nous vînt à
l'idée -elle ne nous y était même pas venue quand on nous
disait que le temps en était venu. Etre sur la liste
d'un parti, ce devrait toujours être prêt à défendre dans un
parlement des propositions, des projets dont on sait par avance
qu'une majorité probable s'y opposera. Des propositions qui
arrivent au parlement, venant de la société. Des propositions
que le parti dont on est candidat n'est pas seul à défendre -et
même, pour certaines, qu'il ne défend pas, ou pas encore. On
pourrait être candidat d'autres partis, sur d'autres listes. On
pourrait être candidat d'une des deux listes de la gauche de la
gauche : après tout, la liste d'Ensemble à Gauche (SolidaritéS,
DAL, PdT) propose un revenu cantonal d'existence, la semaine de
travail de 32 heures, la gratuité des transports publics et la
liste de la LUP la gratuité des crèches, autant de propositions
qu'on soutient, qu'on défend et même qu'on a pu faire nous-mêmes
au parlement municipal où nous sévissons... mais il se trouve
qu'il y a quelque chose de décourageant à observer l'obstination
avec laquelle la gauche de la gauche elle-même dévalue ses
combats, affaiblit sa force politique, gaspille ses chances en
passant plus de temps et d'énergie à se disperser qu'à se donner
les moyens d'entraîner le reste de la gauche un
peu plus à gauche que là où elle campe -c'était déjà l'une des
raisons pour lesquelles on avait adhéré au PS plutôt qu'à l'une
ou l'autre des chapelles de la gauche révolutionnaire des années
septante. Et il y avait déjà, aussi, et il y a toujours ceci,
qu'on peut exprimer sous une forme interrogative, mais en
connaissant déjà la réponse à cette interrogation : n'avons-nous
pas suffisamment d'adversaires à droite, et des adversaires
assez puissants, pour éviter d'y ajouter des adversaires dans
notre propre camp ? Venant de l'anarchisme, passer au PS c'était
évidemment faire un drôle de pas de côté... mais il ne pouvait
être question de baisser les bras (poing levé), ni de se
contenter à commenter les actions et les combats des autres (en
les gratifiant au passage de quelques leçons).
Parce qu'il y a pire que le bruits des bottes : il y a le silence des pantoufles...
Commentaires
Enregistrer un commentaire