Nouveau gouvernement genevois : gauche, trois sièges... droite, trois sièges... Uber, un siège.

Le jour d'après

Genève a élu son nouveau gouvernement : on y retrouvera trois ministres de gauche, trois ministres de droite, et un ministre qui se pose là où ça l'arrange. On y retrouvera aussi une majorité de femmes (dont les trois nouvelles élues). La gauche perd donc un siège, celui de Fabienne Fischer (Verte), gagné lors d'une élection partielle il y a deux ans, le PLR récupère le siège perdu avec l'exclusion de Maudet du parti. Les deux candidats de la droite de la droite, le MCG Morel et l'UDC Dugerdil, sont nettement battus. La vieille Entente PLR-PDC reconstituée pour l'occasion a fonctionné, la nouvelle Alliance bricolée pour pomper l'électorat du MCG et de l'UDC aussi, au grand dam des deux partis de la droite de la droite qui s'étaient bercés de l'illusion que cette "alliance" était leur reconnaissance par la bonne vieille droite bourgeoise traditionnelle, alors qu'elle n'était qu'une sorte d'élongation des anciennes "Ententes" qui, toutes, avaient un adversaire : la gauche. D'abord, pour l'"Entente nationale" rassemblant les conservateurs, les radicaux et les catholiques, contre le Parti socialiste de Léon Nicole, puis l'"Entente genevoise" rassemblant les mêmes sous d'autres noms contre le Parti du Travail, puis le Parti du Travail et le Parti Socialiste, puis, enfin, le PS, la gauche de la gauche et les Verts. C'était une alliance de partis contre d'autres partis. Une alliance de la droite contre la gauche, qui elle-même, dès le début des années septante, faisait alliance (celle du PS et du PdT) contre la droite -et élargissait cette alliance aux Verts dès les années '80.

On ne lâchera rien. Cinq ans, ça passe vite, finalement...

"Genève est à droite, et pour cinq ans", trépignait de plaisir Le Journaliste dans GHI, mercredi dernier. Le grand Conseil de Gernève, en effet, est à droite, et pour cinq ans. Mais Genève ? Le "vrai pouvoir", ici, ce n'est pas le Grand Conseil, c'est le peuple -et pas seulement pendant les cinq ans d'une législature où nous allons nous faire un devoir (et même un plaisir) d'y recourir chaque fois que cela nous semblera l'imposer. Le Grand Conseil vote les lois -mais c'est le peuple qui les accepte (activement ou passivement) ou les refuse. Or le peuple est à gauche ou à droite selon les objets : il vote à droite quand la gauche propose une hausse fiscale (même quand elle ne touche que les plus riche) et à gauche quand elle lui propose un salaire minimum légal. Il vote à droite quand on lui demande de se prononcer sur le principe d'une traversée routière de la rade, et à gauche quand on lui soumet le projet d'une telle traversée. Il élit à droite dans les petites communes, et à gauche dans les grandes. On n'avait pas grand mérite à annoncer avant l'élection du gouvernement cantonal que, quel que soit son résultat, on allait se retrouver à Genève avec un pouvoir législatif sans majorité claire, confronté à un gouvernement sans majorité claire non plus, les deux étant confrontés à des communes dont la majorité sont certes de droite, mais dont celles qui sont de gauche abritent la majorité de la population du canton... On notera d'ailleurs que si la participation est partout en hausse entre les deux tours, elle est (et donc sa hausse l'est aussi) plus élevée en Ville de Genève (43,67 %) qu'en moyenne cantonale (42,06 %)

Et maintenant, "Que Faire" (comme disait un client de la brasserie Landolt au début du XXe siècle) ? ID'abord, tracer une ligne rouge dont le franchissement appellera l'usage du référendum et de tous les autres moyens ("même légaux" disponibles.  Il va falloir défendre le salaire minimum, les droits des locataires et le logement social, défendre la mobilité douce, et donc défendre et renforcer la politique de mobilité que menait le Conseiller d'Etat du "Centre" Serge Dal Busco : des pistes cyclables, des zones piétonnes, la libération de l'espace des places de stationnement en surface, le développement des transports publics. Il va aussi falloir combattre les tentatives de réanimer l'imbécile projet de traversée routière du lac. On ne lâchera rien.

Vous trouvez tout cela fort défensif ? vous avez raison. Mais la meilleure défense restant l'attaque, et le meilleur moyen légal de l'attaque politique restant l'usage des droits démocratiques directs, il nous reviendra aussi de prendre l'offensive sur la réduction du temps de travail, la gratuité des transports publics, les droits de vote, d'élection et d'éligibilité des étrangers établis, l'égalité non seulement rhétorique mais surtout réelle entre les femmes et les hommes. Tout ce qui s'est revendiqué dans la rue aujourd'hui, à nouveau dans la rue le 14 juin, et dans les urne et les parlements genevois pendant cinq ans...

Rien, jamais, aucune liberté, aucun droit, n'a été acquis sans qu'il ait fallu longtemps combattre pour l'obtenir. Il a fallu plus d'un demi-siècle pour que les femmes obtiennent les droits politiques que la Grève Générale de 1918 revendiquait pour elles, et trente ans pour que les premières rentes AVS, elles aussi revendiquées en 1918, soient versées. On peut être impatients et constants dans nos impatiences, défensifs et obstinés dans nos résistances. Cinq ans, ça passe vite, finalement...

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