Brève de comptoir

 Quasiment en même temps que l'aéroport de Genève était paralysé par une grève tombait un sondage Tamedia sur les voyages en avion, qui indiquait que la moitié de 13'550 personnes interrogées ayant le droit de vote déclaraient avoir l'intention de prendre l'avion pour partir en vacan-ces, et que la plupart d'entre elles le feraient sans  «flygskam» (en suédois dans le texte), cette mauvaise conscience de prendre l'avion malgré l'urgence climatique. 60 % des sondés de Tamedia pensent que les personnes qui partent en vacances en avion n'ont aucune raison d'avoir mauvaise conscience, les hommes ayant encore moins mauvaise conscience que les femmes, les hommes et les femmes de droite encore moins que les hommes et les femmes de gauche -la majorité des socialistes (53%), des Verts libéraux (57%) et des Verts (71%) étant tout de mêmeatteints de flygskam... Enfin, ce sont les personnes de plus de 64 ans qui sont les plus sensibles (à 54 %) à la contradiction du voyage en avion et de l'urgence climatique, et les personnes de moins de 35 ans qui y sont (aux deux tiers) les moins sensibles, en même temps qu'elles sont proportionnellement les plus nomb-reuses (59 %) à annoncer qu'elles partiront en vacances en avion. Après tout, elles font ce qu'elles veulent, c'est leur avenir qu'elles bousillent au nom de leur plaisir présent, ce sont elles qui s'en prendront plein la gueule quand il fera 50° en été, pas nous, les plus de 65 ans aujourd'hui: on s'en fout, on sera morts avant...

Samedi, le cinéma genevois Plaza, pour la sauvegarde duquel nous fûmes quelqu'uns à nous battre jusqu'à en empêcher la destruction, et à per-mettre son rachat par la Fondation Wilsdorf, était la proie des flammes. «Nous sommes bouleversés par cet événement que nous ne pouvions imaginer», réagit la Fondation Plaza. «Les dégâts sont importants, mais nous espérons que l’essentiel de la substance historique de la salle ré-sistera à cet incendie. L’incendie est circonscrit à la salle de cinéma, les autres bâtiments de l'ensemble Plaza n’ont pas été touchés. Nous sommes sous le choc, mais malgré tout soulagés qu’il n’y ait eu aucune victime et que l’ensemble de nos partenaires n’ait pas été touché. Nous faisons confiance au travail remarquable des pompiers. Le Plaza renaîtra une nouvelle fois.». Mais cette fois, ce sera contre un incendie, pas contre un propriétaire et malgré l'inertie du monde politique. Les citoyennes et les citoyens, les militantes et les militants, et samedi les pompiers, ont fait leur boulot. Le Plaza n'a pas été détruit. Il pourra en effet renaître.

On dirait qu'on aurait un million (de dollars, d'euros, de francs suisses, on s'en fout) et qu'on voudrait s'acheter un appartement dans un beau quar-tier. A Monaco, avec un million, on peut se payer un cagnard de 17 m2, à Hong-Kong de 21 m2... et à Genève de 37 m2. Bon, ben on va rester locataire à la Jonction... D'ailleurs, on l'a pas le million, alors...

Une grève dans des services «stratégiques» de l'aéroport de Genève-Cointrin a empêché, le 30 juin de six à dix heures du matin, tous les départs et arrivées de vols. La grève était une réponse du personnel et du syndicat SSP à une «réforme» salariale validée par le Conseil d’administration de l'aéroport, dont les personnels et le syndicat dénonce l'arbitraire. La «réforme» transforme les mécanismes de progression salariale automatique et augmentations «à la performance» dont l'enveloppe serait déterminée en fonction des bénéfices de l'aéroport et de critères fixés par les supérieurs des employés concernés... Le personnel ne pouvant chiffrer sa future rémunération, accepter cette «réforme», qui ne touchera pas les hauts cadres,  serait «signer un chèque en blanc» à la direction, On notera au passage que le directeur de l'aéroport, André Schneider, est le mieux payé de tous les directeurs d'établissements publics genevois, avec un revenu de presque 489'000 francs. On notera aussi qu'alors que la «réforme» a pour justification de faire des économies, de doter l'aéroport d'«agilité» face aux perspectives de «stagnation» dans le secteur du transport aérien, l'aéroport est déjà bénéficiaire de 60 millions en 2022 et prévoit de l'être de 100 millions en 2023. Et on considérera, avec Pierre-Yves Maillard, que la «réforme» voulue par la direction de l'aéroport et adoubée par le Conseil d'administration relève d'une «lubie managériale» pour «à tout prix se sé-arer de ce qui rappelle le service public». Finalement, la grève a été suspendue après l'intervention du Conseil d'Etat, en l'occurrence de Nathalie Fontanet appelée à la rescousse par le syndicat en tant que ministre de tutelle de l'entreprise publique mais autonome, dont le personnel est au bénéfice d'un contrat de droit public sans être intégré dans la fonction publique. Un accord est trouvé : l'entrée en vigueur de la «réforme» est reportée au 1er janvier 2025, des négociations vont s'ouvrir entre la direction et le syndicat (SSP) sur ses modalité et ses paramètres, un délai au 1er janvier est posé pour arriver à un accord et la grève s'arrête mais le syndicat avertit: «si nous ne sommes pas satisfaits à la fin, nous n 'hésiterons pas à repartir en lutte». Et on se demande pourquoi diable le Conseil d'administration a-t-il adopté sa «réforme salariale» deux jours avant les premiers départs en vacances alors que le syndicat l'avait déjà annoncé que cette adoption provoquerait une grève ? Et pourquoi la Conseillère d'Etat Nathalie Fontanet a-t-elle attendu la grève pour intervenir ? Cette grève, la première de l'histoire centenaire de l'aéroport, et le premier mouvement syndical à avoir bloqué un aéroport suisse (même si celui de Zurich a aussi connu des conflits sociaux), a provoqué l'annulation de plus du tiers (138) des 400 vols prévus dans la journée, ce qui n'a pu qu'être bénéfique au climat. Et y'a pas qu'à Genève que des grèves ont fait du bien au climat : dans les cinq premiers mois de l'année, la seule compagnie Swiss a annulé 233 liaisons. Et Swiss n'a pas été la seule compagnie touchée, ni la France le seul terreau des grèves : c'est en Allemagne et en Italie, qu'il y en a eu le plus.  Des centaines de vols annulés pour une seule compagnie, des milliers pour toutes ensemble, c'est autant de saloperies en moins relâchée dans l’atmosphère. Si c'est pas de la convergence des luttes sociales et environnementales, ça...

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