Succession socialiste d'Alain Berset au Conseil fédéral : La JS recale la bande des six

La Jeunesse socialiste a auditionné les six candidats socialistes à la candidature au Conseil fédéral, pour succéder à Alain Berset. Verdict : aucun ne convient à la JS. Pas même Jon Pult, dont il se murmure qu'il serait le plus à gauche des six (sait-il que les Conseillers fédéraux étant élus par une Assemblée fédérale très à droite, une étiquette de gauche ne favorise pas l'élection du candidat sur qui elle a été collée ?), et qui a co-fondé la Jeunesse socialiste grisonne. Et surtout, c'est la position minoritaire du PS (et de l'ensemble de la gauche) au gouvernement qui ne convient pas à cette aile gauche socialiste qu'incarne la JS : seul le passage à trois sièges (pas forcément tous socialistes) de gauche au Conseil fédéral pourrait justifier que la gauche y reste : si elle ne pouvait en obtenir que deux, elle devrait le quitter, rompre avec la "formule magique" et la "concordance", passer dans l'opposition. Que la JS (et nous, soit dit en passant) en soyons convaincus est une chose. Que le PS soit prêt à cette rupture est... comment dire ? moins évident...

Prendre conscience d'une défaite historique et de ses raisons

La vice-présidence de la JS, Mélanie Rufi, résume le choix de la JS de ne soutenir aucun.e des six candidat.e socialiste au Conseil fédéral : "nous avons compris qu'aucune de leurs candidatures ne pourrait accoucher de changements significatifs, comme la semaine de travail à vingt-cinq heures ou la nationalisation des grands groupes immobiliers". D'autres personnes "proéminentes" auraient peut-être été "crédibles", mais pas celles-là. En outre, seul le groupe aux Chambres fédérales va choisir le candidat à la succession d'Alain Berset (ou les candidats, s'il décide de laisser un choix à la droite) alors qu'il faudrait "une élection à l'interne" pour que les socialistes élus au Conseil fédéral aient "davantage de comptes à rendre à la base du PS au cours de leur mandat". La vice-présidente de la JS, Mélanie Rufi, fait ce constat : "le PS n'arrive pas à faire passer au gouvernement les projets dont la société a besoin. Pire, il doit défendre des mesures inacceptables issues du camp bourgeois", et il vaudrait mieux "concentrer les forces socialistes dans l'opposition que de servir l'ordre établi au Conseil fédéral".

Ce constat, c'est celui que nous faisions déjà il y a plus de quarante ans, dans la "plate-forme" du "Groupe d'Yverdon" du PS, "changer le parti pour changer la société" -et puisque nous en étions, de ce groupe, avec d'autres (dont notre vieux camarade Alex, qui vient de nous quitter), on nous pardonnera (ou pas, peu importe), de nous autociter : "la composition actuelle du gouvernement fédéral (qu'on retrouve dans beaucoup de cantons et de communes) a permis à la bourgeoisie suisse d'institutionnaliser la collaboration de classe dans le domaine politique. Par l'exigence du retrait des socialistes minoritaires du Conseil fédéral, nous luttons, dans l'objectif de la rupture avec le capitalisme, pour le renforcement de la démocratie à la base dans le parti, au détriment des structures hiérarchiques et pour soumettre le parlementarisme à l'exigence de la réalisation des objectifs socialistes". 40 % des délégués d'un congrès du PSS avaient voté pour ce retrait... et aujourd'hui, la JS considère (pour reprendre les mots de Mélanie Rufi) que "la gauche ne doit rester au gouvernement que s'il y a des possibilités de progrès, comme un troisième siège"... ou une majorité de gauche, comme il en est dans les plus grandes villes du pays et nombre de villes moyennes.

S'autociter, s'autoréférencer, comme on vient de le faire avec la "plate-forme du "Groupe d'Yverdon", le fait-on par nostalgie, par fidélité ? Plutôt parce que "plus ça change, plus c'est la même chose"... et que ce que nous disions il y a plus de quarante ans n'a sans doute guère perdu de pertinence, si nous l'écririons autrement aujourd'hui (la langue de bois est biodégradable) : "Le rapport des forces dans notre pays est tel que le PSS est une force insuffisante, mais indispensable à tout espoir de changement"... 

"Le seul point de départ concevable aujourd'hui pour une gauche réaliste est de prendre conscience de (sa) défaite historique", écrit Perry Anderson. Et cette prise de conscience faite, ce point de départ atteint, il faut que suive une autre prise de conscience : celle des raisons de cette défaite "historique", que ne peut masquer quelque succès électoral que ce soit. Car cette défaite ne sanctionne pas une échec dans le conquête de sièges, mais l'abandon d'une ambition initiale de changement social, profond, radical. Socialiste, quoi...

Commentaires

Articles les plus consultés