Fonds de tiroir

 C'est pas encore une règle, mais ça commence à devenir une habitude: récolter (ou faire récolter...) des signatures pour un référendum ou une initiative en disant du texte le contraire de ce que le texte propose... Le 16 février, l'initiative pronucléaire «stop au blackout» était déposée avec près de 130'000 signatures. Récoltées comment et par qui ? A Genève, des récolteurs de signatures payés (par l'entreprise Devcom) ont présenté l'initiative comme émanant des Verts (qui évidemment, antinucléaires, n'y sont pour rien). Les feuilles de signatures utilisées n'indiquaient pas que l'initiative émanait de la droite pro-nucléaire. En 2019, deux cas avaient déjà illustré la même pratique d'enfumage : le référendum de l'UDF contre la pénalisation de l'homo-phobie et le référendum de l'UDC contre le congé paternité avaient déjà été présentés par des récolteurs de signatures payés comme le contraire de ce qu'ils étaient. On se souvient aussi d'avoir été abordé à Genève par une récoltrice de signature qui voulait nous faire signer le référendum de la droite contre l'autorisation de toutes les tenues de bains dans les piscines municipales en prétendant qu'il ne s'agissait que de s'opposer à l'obligation faite aux femmes de porter un «burkini»... Or il se trouve qu'une fois qu'une signature a été apposée, il est impossible au signataire de la retirer, même s'il s'est aperçu qu'il avait été trompé: signé, c'est signé, punktschluss! En outre, à Genève, faire appel à une entreprise qui rémunère des personnes pour récolter des signatures pour un réfé-rendum cantonal ou une initiative cantonale est interdit... et qu'au plan fédéral, s'il est autorisé de faire appel à une entreprise rémunérée au forfait, il est interdit de rémunérer des récol-teurs en les rétribuant à la signature. Et puis, surtout, transformer un droit démocratique en marché rémunéra-teur parce que des partis sont in-capables de récolter des signatures eux-mêmes, est-ce que ça n'est pas se foutre de la démocratie ? Poser la question, c'est y répondre (gratuitement), non ?

Alors comme ça, la Suisse n'organisera pas les JO d'hiver 2030, ni ceux de 2034, mais devrait avoir ceux de 2038 ? C'est le directeur exécutif du Comité international olympique qui l'a annoncé. Peut-être en peu tôt, peut-être en s'avançant un peu vite, mais bon, ça a suffi pour calmer le désespoir des partisans obsessionnels de l'orga-nisation de Jeux Olympiques en Suisse. N'importe quand, mais des JO. D'hiver, d'été, du printemps, de l'automne, mais en Suisse. Et si possible sans que le peuple puisse se prononcer. La Confédération a an-noncé qu'elle était prête à accorder son appui politique à l'organisation du machin: le directeur de l'Office fédéral du sport a proclamé fièrement que la Conseillère fédérale Viola Amherd «était à fond derrière ce projet». Qui devrait être financé par des fonds privés pour, au moins, 250 millions de francs (mais le CIO, qui a pris l'habi-tude de s'appuyer sur des fonds pub-lics, va réclamer des garanties...). Reste donc la question qui fâche : et si le peuple, consulté par référendums cantonaux, disait «non», comme en 2013 dans les Grisons et en 2018 en Valais ? Ben, la solution est toute trouvée : yaka ne pas lui donner la possibilité de se prononcer, au peuple... ou s'il l'a tout de même, de la réduire à un seul canton, ce qui permettrait de rapatrier les compétitions prévues dans ce canton dans un autre, qui ne se serait pas prononcé. Enfin, y'a le problème de la neige : est-ce qu'il y en tombera encore assez ? Parce que la limite de l'enneigement  ne cesse de monter (elle dépassera 2000 mètres en 2038 : en dessous, c'est de la pluie qui tombe, et y'a pas de compétition de ski nautique aux JO d'hiver). Notez bien qu'en 2038, on aura 86 ans, alors on s'en fout un peu, des JO d'hiver. Sauf que si ça se trouve, il va falloir se les farcir à jet continu à la télé. Si on est encore en état de regarder la télé.



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