Victoire de la gauche et de l'Asloca sur le PAV
Pour qui, les nouveaux logements ?
C'est le plus gros projet de création de logements
à Genève : le PAV doit en accueillir 12'400, soit une trentaine
de milliers d'habitants dans les communes de Lancy, Carouge et
Genève. Et la question à laquelle devaient répondre les Genevois
et Genevois disposant du droit de vote, dimanche dernier, était
bien celle-ci : pour qui, ces logements ? D'abord pour ceux qui
en ont besoin, ont-ils et elles répondu: à 57 % des votes, ils
ont repoussé deux projets de loi de la droite et des milieux
immobiliers qui voulaient accroître la proportion de logements
en propriété par étage et ancrer cette propriété dans le temps,
en "pleine propriété". Une belle victoire de la gauche et de
l'Asloca, qui rappelle que face à la pénurie de logements à
Genève, il n'y a pas d'autre réponse audible que celle d'offrir
des logements à des loyers accessibles à la majorité de la
population.
On n'a pas dékoulakisé Genève, on a défendu les
Genevois...
Ce à quoi on a assisté avec l'offensive de la
droite contre la répartition des logements qui seront offerts au
PAV, c'est à une véritable tentative d'accaparement de terrains
publics par les milieux immobiliers, sous prétexte de satisfaire
une hypothétique volonté de la population de devenir
propriétaire de son logement principal (une partie importante de
la population l'étant déjà d'une résidence secondaire, en Suisse
ou à l'étranger), quitte à s'endetter à vie pour satisfaire ce
rêve balzacien. La droite et les milieux immobiliers se désole :
elle rend responsable de sa défaite la "peur de la spéculation
immobilière" qu'aurait instillée la gauche dans la campagne (une
campagne pourtant dominée par les partisans des deux lois
refusées par le peuple). Mais c'est le Conseiller d'Etat Antonio
Hodgers qui a le mieux résumé les raisons d'un verdict populaire
dont il se réjouit : "le message des Genevois.e.s est très clair
: pas de spéculation et pas de privatisation de terrains en
mains publiques dans le PAV". La droite n'a même pas réussi à
convaincre massivement son propre électorat, puisque des
communes qui lui sont politiquement acquises ( comme Satigny,
Dardagny, Genthod), et les arrondissement de la Ville de Genève
qu'elle tient encore (la Vieille-Ville, Floriussant, Champel,
les Crêts) l'ont lâchée : c'est dire si le "rêve d'être
propriétaire" est mobilisateur à Genève...
Dans une tribune de la "Tribune", le président de la Chambre genevoise immobilière, Stéphane Penet, évoquait un "équilibre à rétablir" au PAV entre les logements à louer et les logements à vendre en PPE. Comme si le rapport entre les uns et les autres établi par un vote populaire en 2018 instaurait un déséquilibre... dans les urnes, les Genevois ont pris la décision inverse du plaidoyer de la CGI : l'équilibre, c'était celui établi en 2018, le déséquilibre, celui que proposait la droite et les milieux immobilier six ans plus tard. Et ce n'est pas affaire de pourcentage (l'équilibre de 2018 était d'ailleurs le fruit d'un compromis entre la droite et la gauche) mais de "cible sociale" : les logements du PAV doivent être accessibles au plus grand nombre, pas seulement à ceux qui ont les moyens de les acheter, et à quoi la proportion établie en 2018 de 12 % de logements en propriété par étage répond finalement suffisamment. Et puis, il s'agit de logements construits sur des terrains en mains publiques, et qui, de l'avis majoritaire, doivent donc le rester -ce que le régime du droit de superficie permet, tant qu'on ne l'affaiblit pas en le prolongeant jusqu'à le faire durer un siècle... Là, c'est bien la question de la maîtrise du foncier à laquelle le vote populaire du 3 mars a répondu -non pas en municipalisant ou en étatisant la totalité du sol urbain (ce qui, de notre immodeste point de vue, serait pourtant parfaitement justifié, surtout dans un canton où l'espace constructible est si rare), mais en défendant la part de ce sol qui est déjà en mains publiques. Parce que c'est là-dessus qu'on peut construire du logement répondant aux besoins de la population d'un canton où sévit la crise du logement.
Le 3 mars, les Genevois n'ont pas dékoulakisé
Genève, ils ont défendu leur droit à se loger sans se ruiner...
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