Encore un effort pour défendre les droits des locataires
Dimanche, la Suisse votera (entre autres...) sur deux réformes conjointes du droit du bail qui ont toutes deux pour objectif de faciliter les résiliations de bail et les relocation à loyers augmentés. Les deux lois faciliteraient les congés en transformant le droit du locataire de sous-louer en octroi du bailleur de l'autorisation de sous-louer, et en affaiblissant la protection contre les congés de représailles. Les sondages signalent des intentions de vote équilibrées entre partisans et opposants, avec un légère avance des opposants -trop légère pour que nous puissions, même dans un pays qui compte une majorité de locataires (ce sont des centaines de milliers de personnes, locataires ou sous-locataires, qui sont concernées) attendre en confiance le résultat. D'autant qu'il sera peut-être déterminant pour la suite de l'offensive des milieux immobiliers contre les droits des locataires...
Résilier un bail et relouer, ça rapporte aux uns et coûte aux autres
      
       Les modifications proposées au vote
        dimanche prochain portent sur deux lois différentes, avec la
        même intention de s'en prendre aux droits des locataires. Ces deux propositions sont directement issues du lobby
        immobilier. Et elles en annoncent d'autres, toujours avec le
        même objectif : réduire les droits des
        locataires et renforcer ceux des propriétaires, faciliter les hausses de loyer.  Comme s'ils n'augmentaient pas déjà assez : En Suisse, les loyers auraient dû baisser de 5 % depuis
        2005, mais ils ont augmenté de 25 % et les locataires ont ainsi
        payé 10 milliards de francs en trop à leur bailleur. En moyenne,
        chaque locataire a payé 360 francs par mois de loyer en trop
        depuis vingt ans parce que les propriétaires et les
        investisseurs calent les loyers sur les prix du marché au lieu
        de caler sur les coûts qu'ils assument réellement.  
La loi sur la sous-location donnerait au bailleur
        le droit de refuser la sous-location, qui est aujourd’hui un
        droit du locataire, à quelques conditions d'évidence : le
        bailleur ne peut pas la refuser si le locataire ne se fait pas
        d’argent sur le dos du sous-locataire et s’il a l’intention de
        revenir dans son logement. Si la
        modification de la loi devait être acceptée,  le propriétaire ou
        le bailleur pourrait refuser de donner son accord à une
        sous-location pour le seul motif qu'il n'a
        pas envie de le donner. La sous-location ne serait donc plus un
        droit. En outre, à supposer qu'elle soit autorisée, elle serait
        limitée à deux ans. Le ou la locataire ne pourrait plus
        sous-louer facilement une chambre à un enfant majeur ou à un
        étudiant pour la durée de ses études, une personne âgée
        pour pouvoir payer son loyer en restant dans son appartement, et une entreprise ne
        pourrait plus sous-louer une partie de ses locaux à sa propre
        filiale si le bailleur le refuse. Toutes
        les conditions posées à la possibilité de sous-louer se
        résumeraient en une seule : le bon vouloir du bailleur. Et si le
        locataire n'a pas obtenu l'autorisation du bailleur, ou si le
        bailleur considère que le locataire a fourni de fausses
        informations, ou n'a pas fourni des informations exigibles, le
        bailleur pourra résilier le bail, virer le locataire (et le
        sous-locataire) et relouer le logement. Plus cher, bien entendu.
      
    
Avec la deuxième modification légale soumise au
        vote, la résiliation d'un bail pour "besoin propre" du bailleur,
        que la loi actuelle permet déjà, serait facilitée et le
        locataire ne pourrait plus faire valoir ses droits sans craindre
        la résiliation de bail. La modification proposée de la loi
        libérerait le propriétaire d'un bien loué de l'obligation de
        prouver l'urgence du "besoin propre" qu'il invoque pour résilier
        le bail. Là encore, il s'agit de faciliter cette résiliation
        pour faciliter une relocation avec un loyer plus élevé,
        puisqu'une fois le bail résilié au prétexte d'un "besoin propre"
        dont on n'aurait plus à prouver l'urgence, ce "besoin propre",
        comme par magie, aurait disparu avec le locataire dont le
        bailleur voulait se débarrasser pour pouvoir le remplacer par un
        autre. Or à Genève, en un an (2023-2024),
        les loyers des baux en cours ont augmenté de moins d'un pour
        cent, mais ceux des nouveaux baux de presque 9 % par rapport au
        loyer de l'ancien bail. Résilier un bail et relouer, ça rapporte aux uns et coûte aux autres.
      
Bien plus facile que pour le locataire dont le bail a été résilié, de trouver un nouveau logement dont il puisse assumer le loyer.



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