La Ville de Genève veut, et peut, racheter la campagne Masset
Bien commun hors du commun...
Il y a à Genève, dans un des quartiers les plus
densifiés de la ville la plus densifiée de Suisse, un vaste
espace vert, la Campagne Masset. Des arbres, une vigne, des
écureuils, des oiseaux. De quoi faire un parc. Ou un jardin.
Avec une maison de maître du XVIIIe siècle, rénovée il y a
quinze ans. Et le Rhône, juste en-dessous. Et ce "bien hors du
commun" est à vendre pour devenir un bien commun. Et la Ville
de Genève peut l'acheter. Et elle en a les moyens sans péjorer
son budget, parce que c'est un investissement (qui accroît sa
fortune). Et le Conseil municipal s'est dit, hier, d'accord de
mettre tout cela à disposition de la population de la Ville. Et
donner à la commune un peu plus de maîtrise foncière de son
propre territoire. Cette proposition n'émane même pas de la
gauche, si toute la gauche la soutient, mais de la Conseillère
municipale MCG Jasmine Menetrey. Et elle est cosignée par des
membres de tous les groupes -y compris de ceux qui s'y opposent,
et annoncent qu'ils veulent lancer un référendum. Grand bien
leur fasse. Et nous fasse.
Le manoir, le parc, le marais et les nénuphars
En voulant acheter la Campagne Masset à son
propriétaire actuel, qui la vend, nous voulons saisir une
opportunité : celle de rendre la Ville de Genève propriétaire
d'une villa et d'un terrain en Ville de Genève. La villa a 300
ans, et elle est splendide. Quant au terrain on peut en faire un
parc, un jardin, ce qu'on choisira et qu'on aura le droit d'en
faire, mais en tous les cas un espace vert accessible au
public.
Le crédit accordé (22 millions) pour cet achat
n'affecte pas le budget de fonctionnement, et n'aggrave donc pas
le déficit: c'est un investissement, pris sur un budget déjà
disponible de 180 millions. Et cet achat ne prétérite nullement
les ressources à disposition pour l'entretien des immeubles de
la Ville.
La villa est classée, mais elle n'est pas plus intouchable que la salle dans laquelle débat le Conseil municipal, sise dans un immeuble classé (l'Hôtel-de-Ville) datant du XVe siècle, mais n'en a pas moins été complètement rénovée il y a quelques années. On peut aussi donner pour exemple de ce que l'on peut faire dans un édifice classé celui de la salle du cinéma Le Plaza, que nous avons, avec un mouvement citoyen, sauvé de la destruction et dont nous avons permis le rachat par la célèbre et incontournable F Q T L M C M D I N F P D L N (Fondation que tout le monde connaît mais dont il ne faut pas dire le nom) qui en rénove et transforme les salles alors que l'immeuble est désormais classé.
Il y a un intérêt public prépondérant à acquérir
cette maison et ce terrain, et une utilité publique à le faire.
L'intérêt public, c'est la maîtrise du foncier, la maîtrise par
la Ville de son propre territoire. L'utilité publique, c'est
celle qui consiste à répondre aux besoins de locaux pour des
prestations et des actions d'utilité publique. Ces besoins (besoins scolaires et parascolaires, petite enfance,
hébergement d'urgence, équipements publics...) sont tels, en Ville de Genève, et dans tous les
domaines, qu'on n'aura aucune difficulté à y affecter la maison
et le grand espace vert que nous proposons d'acquérir.
Pourquoi alors s'y opposer ? Un communiqué prétend nous le dire. Il sort du Marais, pour reprendre la dénomination qui était donnée dans les assemblées révolutionnaires françaises qui ont posé le clivage gauche-droite, de ce qu'on désigne aujourd'hui comme le "Centre" . A la gauche de la présidence de l'Assemblée se tenaient ceux qui voulaient faire la révolution, ou continuer de la faire. A droite de la présidence, se tenaient ceux qui voulaient arrêter la révolution, ou revenir en arrière. Et entre les deux, se tenaient ceux qui attendaient de savoir d'où souffle le vent pour savoir de quel côté se tourner. C'était cela, le Marais. Et comme c'est un écosystème, il peut évoluer, sans changer : à Genève, on y voit désormais des nénuphars verts libéraux.
Il nous dit quoi, le communiqué du Marais ? Il
nous dit, sans doute involontairement, mais pas moins clairement
pour autant, que la seule motivation des opposants à cet achat
est de faire, en annonçant un référendum, un peu de bruit autour
d'eux, de donner l'impression qu'ils existent politiquement
comme une force, quitte à dire n'importe quoi. Comme lier leur
refus de l'achat de la maison et du terrain à l'acceptation en
vote populaire, dimanche dernier, de cadeaux fiscaux de l'Avent,
et à un budget de fonctionnement 2025 de la Ville déficitaire.
On ne reprochera pas à la droite genevoise de mettre en évidence
le seul vote qu'elle ait gagné dimanche dernier, mais on
rappellera tout de même que si le budget de la Ville est
déficitaire de 73 millions, c'est précisément du fait de ces
cadeaux fiscaux qui réduisent les recettes de la Ville. Et que
de toute façon, un investissement n'est pas porté au budget de
fonctionnement. Et que refuser celui qui est proposé par l'achat
de la maison et de son terrain ne réduira pas d'un centime le
déficit.
Alors, le Marais veut lancer un référendum ? Qu'il
y aille, personne ne l'en empêche. On est même prêts à l'aider.
Pas par choix politique, mais par devoir compassionnel : on ne
peut pas, décemment, le laisser barboter dans les confusions,
les à-peu près, les petits calculs pré-électoraux foireux, sans
au moins essayer de l'aider à en sortir.
Ne serait-ce que par respect du débat politique.
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