Fonds de tiroir

 Le 3 mai, la majorité de droite du Grand Conseil a adopté le projet de baisse d'impôts présenté par la majorité de droite du Conseil d'Etat à partir d'un projet de loi de la droite parlementaire (UDC, PLR, Centre). La baisse d'impôts proposée va de 5,3% à 11,3% pour les ménages aux revenus imposables de 35'000 à 411'000 francs par an. Parce que pour la droite genevoise, avec 411'000 francs de revenu imposable par an, on est encore dans la classe moyenne. Le canton perdrait 326 millions de ressources fiscales, les communes 108 millions, dont une cinquantaine pour la Ville de Genève. Les communes ont fait savoir qu'elles s'opposaient à cette baisse de leurs ressources induite par la baisse d'impôt, mais le Grand Conseil n'en a rien à cirer, des communes. Et s'il peut priver la Ville de Genève de 50 millions de ressources, il va pas de gêner, le Grand Conseil. Le peuple se prononcera, puisqu'il y a référen-dum obligatoire. On lui fera donc savoir, au peuple que priver les communes de ressources, c'est les empêcher de créer des places de crèches, par exemple. Ou les contraindre à augmenter leurs déficits budgétaires ou leurs impôts. Pour pouvoir ensuite, si elles sont à majorité de gauche, dénoncer une pression sur la clase moyenne. Une bonne petite manip' politicienne.

Mardi dernier, la police genevoise a évacué d'Uni Mail ses occupants pro-palestiniens (qui avaient an-noncé une sortie pacifique de l'Université), interpellé et souvent menotté une soixantaine d'entre elles et eux, alors qu'ils ou elles n'opposaient aucune résistance, relevé leurs identités, pris leurs dépositions et menacé de les faire passer en conseil de discipline.  Amnesty International dénonce l'attitude de l'Université genevoise, qui avait porté plainte (plainte retirée après l'évacuation): «Mani-fester pacifiquement est un droit humain fondamental garanti par la Constitution et les traités internationaux de droits humains, en particulier par la CEDH. Toute personne ou autorité qui assume une tâche officielle, telle qu’une université ou une haute école, est ainsi tenue de le protéger, respecter et de contribuer à sa réalisation». Amnesty demande «aux universi-tés, hautes écoles et écoles poly-techniques au sein desquelles se tiennent des manifestations pacifi-ques de s’en tenir à leurs obli-gations de respecter et protéger le droit de manifester et de ne faire appel à la police qu’en cas de violence». Le lendemain de l'éva-cuation, on apprenait que l'époux de la rectrice qui avait requis cette évacuation, est administrateur de la filiale suisse d'une entreprise américaine (Pratt & Whitney) qui fournit des réacteurs pour les avions de combat israéliens et des composants pour les drones déployés à Gaza. Conflit d'intérêt ? Ben non, tant que la société machin & chose ne fournit pas des menottes à la police genevoise...

Comme vous avez reçu votre en-veloppe de votation pour celles du 9 juin, vous aurez pu constater que leur menu est copieux. Y'a du fédéral, du cantonal, du municipal. Entrée, plat de résistance, fromage ou dessert. Et dans les objets fédéraux, y'en a un dont le titre avait de quoi nous séduire : «pour la liberté et l'intégrité physique»... Ouais, la liberté et l' intégrité physique, on est pour. Et ça tombe bien, l'initiative prévoit d'inscrire dans la constitution que «les atteintes à l'intégrité physique ou physique d'une personne requièrent son consentement».  Donc on vote... euh... Comment on fait pour l'appli-quer, ce principe ? On voit bien que ça vise la vaccination obligatoire (les initiants sont antivax), mais pour le reste, ça vise quoi ? Parce que nous, on considère que la circulation automo-bile, par exemple, atteint à notre intégrité physique en salopant l'air qu'on respire alors qu'on y a jamais consenti... et on vous parle même pas de ce qui atteint notre intégrité psychique (le racisme, les horaires de travail, la publicité dans l'espace public, la discipline de parti) sans qu'on y ait jamais consenti... Quant au vaccin, si on nous l'administre, c'est bien pour que la maladie contre laquelle on nous vaccine n'atteigne pas notre intégrité physique, non ? Bref, on barbote dans le doute, et finalement, on a voté blanc. Voter blanc, c'est pas s'abstenir, c'est voter pour dire que la question est si mal posée que quelque soit la réponse qu' on lui donne, elle sera mal donnée.

«Universités: quand le voile tombe», c'était le titre d'une chronique farcie de citations de ce vieux cuistre de Boileau, de Laure Lugon Zugravu dans «Le Temps» à propos des occupations d'universités suisses par solidarité avec les Palestiniens. Des occupations auxquelles la chro-niqueuse témoigne d'une allergie absolue: les occupants ? une «poignée d'élèves» habités d'un «fanatisme naïf» et d'«intolérance» bénéficiant (si on peut écrire...) de «soutiens po-litiques extrémistes» et de «l'allégeance idéologique d'une partie du corps professoral». Bref, «le voile tombe». Et en effet, il est tombé : en fait de «fanatisme naïf», d'«intolérance», d'extrémisme, on a eu droit à plusieurs intrusions de contre-manifestants pro-israéliens (ou de manifestants contre-palestiniens, comme vous voudrez), le 8 mai pour arracher des drapeaux palestiniens, le lendemain pour perturber aux cris d'«Israël vaincra» (ou «vivra») une minute de silence en hommage aux victimes des bombardements de Gaza, et le lendemain encore, pour asperger les occupants de mousse anti-incendie. Et pour finir de «lever le voile», on a d'abord appris que l'époux de la rectrice qui avait requis l'intervention de la police pour l'évacuation des occupants pro-palestiniens de l'Uni (ce qu'elle regrette) est administrateur de quatre succursales suisses d'un fabriquant américain de moteurs d'avions équipant des drones israéliens et des avions américains de l'armée israélienne (la rectrice assurant ignorer «le détail des activités» de son époux), et que plusieurs perturbateurs pro-israéliens de l'occupation émargeaient ou avaient émargé au budget de la mission d'Israël à Gewnève. Ouais, finalement, «le voile tombe», c'était un bon titre...on sait juste pas ce qu'il voilait et où il est tombé, le voile...

De janvier à mars 2024, la population résidante du canton de Genève a augmenté de 2248 per-sonnes par rapport au trimestre pré-cédent, soit +0,4 %. En une année, de mars 2023 à mars 2024, la progression s’est établie à 1,2% (+ 6 430 personnes), Fin mars 2024, la population du canton était de 526 627 personnes. Tout ça ? Ouais. Plus on est de fous, plus on rit. A G'nêve. 

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