Le personnel de Tamedia TX Group) s'exprime
Le 12 septembre, le personnel de TX Group, l’éditeur en Suisse romande de la Tribune de Genève, de 24 heures et du Matin Dimanche, mais aussi le propriétaire du centre d’impression de Bussigny ou de l’agence d’affermage publicitaire Goldbach, a débrayé pour protester contre le regroupement des titres du groupe et l’abandon de deux des trois imprimeries. Dans le texte ci-dessous, la rédaction de la Tribune de Genève explique ce débrayage. Le texte aurait pu paraître dans la Julie, mais l'éditeur l'a interdit. Le Courrier a donc accordé «l’asile politique et journalistique à ses confrères» et publié le texte qu'ils ne pouvaient publier dans leur journal. On ne pouvait ici faire moins que Le Courrier (que peut-être tous ceux qui nous lisent ne lisent pas -en quoi ils ont tort).
Ce texte aurait dû paraître dans les colonnes de la Tribune de
Genève sous forme d’encart publicitaire afin d’expliquer
pourquoi ses employés ont décidé de débrayer jeudi matin. Sa
parution a été interdite par un éditeur qui oublie la valeur de
l’in-formation et l’impact des réseaux sociaux. Quel paradoxe!
Qu’à cela ne tienne!
Les employés de la Tribune de Genève débrayent en ce jour pour
manifester leurs craintes quant à l’avenir de leur journal. Nous
estimons que les restructurations an-noncées le menacent. Et
pour cause: la direction a annoncé la suppression de 200 postes
dans les imprimeries, et son intention de biffer 90 postes
équivalents temps plein dans les rédactions. La Tribune de
Genève est particulièrement menacée. D’importantes coupes
signifieraient son dysfonctionnement, et, à terme, son
démantèlement. Il faut être clair, nous arrivons à l’os. La
Tribune de Genève sort d’une longue série de restructurations,
notamment en 2016, 2018, 2023 qui se sont traduites par des
pertes d’emploi constantes et une nouvelle saignée entraînerait
un affaiblissement de notre couverture d’information. En dix
ans, nous avons déjà perdu environ un tiers de nos forces. C’est
le dos au mur que nous nous battons tous les jours pour assurer
la survie de notre titre et le respect du contrat d’information
qui nous lie à vous. Comment imaginer maintenir notre couverture
après une nouvelle réduction des effectifs? Elle ne pourra que
conduire à une diminution du suivi des affaires politiques,
judiciaires, culturelles et sociales de ce canton.
Personne n’est l’unique responsable de ce lent naufrage, qui est
aussi celui d’autres journaux. Une chose est sûre, il n’est pas
lié à votre désaffection! Jamais notre lectorat sur internet ou
sur papier n’a été aussi important; il n’est pas lié non plus à
un retard dans la transition numérique, la moitié de nos abonnés
sont passés à l’abonnement numérique. Non, nos difficultés sont
liées à une érosion de la publicité, désormais captée par des
annonceurs mondiaux. Les décisions erratiques de notre éditeur,
qui a sorti les secteurs les plus rentables, celui des annonces
de notre périmètre comptable, ou qui a livré gratuitement notre
contenu aux réseaux pendant des années, est aussi en cause.
Faut-il s’y résigner? Non.
Il est possible d’inverser la tendance si chacun prend ses
responsabilités: notre éditeur en investissant enfin
sérieusement dans ses titres, comme le font de grands journaux
étrangers, y compris régionaux; les pouvoirs publics en cessant
de regarder passer les trains: au nom de quoi, la presse
audio-visuelle privée et publique suisse pourrait-elle être
soutenue et pas la presse écrite? Au nom de quoi l’Etat canadien
négocie-t-il une rétrocession de cent millions avec Google pour
aider la presse et pas la Suisse? L’évaporation de la presse est
un désastre. Aux Etats-Unis, frappé avant nous, les déserts
médiatiques ont engendré une hausse de la corruption et des
mauvaises pratiques et un affaiblissement de l’esprit public. Il
en irait de même à Genève où la sensibilité locale aurait un
espace de moins pour se faire connaître.
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