Des effets électoraux de la mixité sociale

Cocktail gagnant

Découverte bouleversifiante au détour d'une statistique de notre Office cantonal de la statistique et de l'enfonçage certifié de portes ouvertes : à Genève, les contribuables à bas revenu habitent les villes, en particulier celles de Genève, Vernier et Onex, où ils forment jusqu'à 35 % et plus du total des contribuables, pour une moyenne cantonale de 25 %. A l'inverse, les zones abritant la plus forte proportion de contribuables à hauts revenus se situent sur les rives du lac hors de la Ville de Genève ou, dans celle-ci, à Champel et Florissant-Malagnou. On nous en dira tant... Mais un examen un peu plus attentif permet de nuancer quelque peu ce qui sans cela relèverait d’une évidence crasse -et en même temps, de casser le lieu commun d'une gauche reposant sur le vote des « bobos » pendant que les « prolos » basculent à l'extrême-droite : les quartiers populaires de la Ville de Genève sont toujours ceux où la gauche est, largement, majoritaire, en même temps qu'ils sont de ceux où l'UDC et le MCG font des résultats médiocres, en comparaison de leurs résultats cantonaux. L'explication ? la mixité sociale : là où elle est forte, le populisme plafonne; là où elle est faible, il cartonne. De bourges ou de racaille, le ghetto rend con.


Matelas électoral et oreiller de paresse
Il vaut la peine de comparer la répartition géographique de la population en fonction du revenu et celle des votes lors des élections populaires : les quartiers et communes pauvres élisent tendanciellement à gauche, les quartiers et communes riches à droite, mais les partis populistes de droite (MCG, UDC) font des percées remarquables dans les communes pauvres (Onex, Vernier) et les quartiers riches de la Ville (Champel, Florissant, Malagnou), où la mixité sociale est la plus faible. En revanche, là où elle est forte, comme dans les quartiers populaires de la Ville, leurs résultats sont largement inférieurs à la moyenne cantonale... Il est également impossible de corréler le vote UDC (ou, à Genève, MCG) avec la présence d'une forte immigration -s'il devait y avoir corrélation, elle serait plutôt négative, l'UDC réalisant en Suisse ses meilleurs résultats dans des trous où le dernier immigrant a été brûlé vif il y a 150 ans (il venait de la vallée d'à côté). A contrario, en Ville de Genève ses résultats et ceux du MCG sont médiocres, voire franchement mauvais, dans des quartiers où la majorité de la population est étrangère (et la majorité de la population étrangère immigrée), comme les Pâquis, terrain de jeu sécuritaire de toute la droite et de l'extrême-droite, mais où l'élection 2009 du Grand Conseil a vu la gauche de la gauche prendre la tête (si l'on additionne ses deux listes) des forces politiques, la gauche au sens large rester largement majoritaire, les radicaux et le PDC tomber sous la barre du quorum, et les libéraux et l'UDC se situer juste au-dessus. En Ville de Genève, tous quartiers confondus, et malgré son recul lors des dernières élections cantonales, la gauche (au sens large : Verts, A Gauche Toute et PS) reste à plus de seize points devant l'Entente (47,6 % des suffrages contre 31,13 %), et à plus de vingt-six points devant l'addition de l'UDC et du MCG. La gauche a un matelas électoral en Ville ? Sans doute. Mais elle peut s'y endormir, comme y rebondir.

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