Parler ou se taire, cela se vaut

Tout silence est de mort
et toute parole tue qui parle
nous mourrons si nous nous sommes tus

nous mourrons si nous avons parlé
Mourrai-je en ayant dit
pour avoir dit
ou pour ce que j'ai dit ?

Dans mes mains, d'autres mains
et le désert, steppe d'or
et les printemps
que le vent parsème des fleurs à venir
contre ces gestes arides
et ce sourire vide et froid
qu'impose la solitude subie
à la liberté choisie.

Les lèvres que je baise sont un chemin
les mots s'y éteignent et y meurent
Je ranime d'un coup d'abandon
l'attente sur la bouche mordue
une goutte de rubis s'étoile
et marque les draps
du lit défait où la nuit s'est peuplée.

Il y a dehors l'orage
et dans les rues l'ennui et la fatigue
et de tristes corps
perdus, errants,
ne tenant effondrés ou debout
que par le seul souci de l'apparence.
Je passe devant les murs d'une ancienne prison
comme le fantôme devant la ruine qu'il hanta
Je m'en viens aimer ici
me poser sur cette sente et ces taillis
l'enfance s'envole quand naît le désir.

Ton corps entrouvert
ma si douce

que guette la gueule sombre du temps
le cri placardé sur la pierre
l'appel hurlé du silence
le désir quand blesse le plaisir
plus douloureux que la meurtrissure sans mal des prisons
La force me manque et le courage s'enfuit
en gestes tremblants
et en mots lourds agonise la flamboyante liberté
la mort rôde, toute de patience.

Et l'on s'enivre
et se blesse
et se refuse
et se tue en de sauvages amours
Il suffirait d'un geste
d'un baiser, d'une caresse
d'un pas, d'un mot
d'une nuit bruissante pour chuchoter l'irréparable
Ce sont des mots qui se chantent
ce sont des plaies qui s'ouvrent.

Je te souhaite de ne pas m'être invitée
je me souhaite de ne pas t'être étranger.

Commentaires

Articles les plus consultés