Fonds de troir

 Le 18 décembrede huit heures du matin à minuit et demi, c'était le pensum annuel du Conseil municipal : le débat budgétaire. On l'a terminé par des applaudissements où la satisfaction du devoir accompli le disputait au soulagement d'en avoir fini avec ce pensum. Ce fut long, le plus souvent très chiant, parfois un chouïa chaotique, avec quelques moments assez pathétiques... On a eu notre ration d'évocation du sort tragique de la «classe moyenne» (jamais définie, mais reportez vous à la rubrique poujadiste hebdomadaire du GHI pour avoir une vague idée de ce à quoi on peut bien faire allusion quand on parle de la «classe moyenne»). Et plus que notre ration de propositions absurdes, inutiles, parfois inacceptables (on n'en a d'ailleurs accepté aucune). Le PLR a proposé une baisse de 0,04 centimes additionnels pour la seule raison qu'il  lui fallait démontrer qu'il était favorable à une baisse des impôts. Il a aussi proposé de supprimer la quasi-totalité des nouveaux postes de travail proposés par le Conseil administratif et de renoncer à internaliser quatre postes et demi de nettoyeuses de bureaux de l'administration municipale (le PDC a fait la même proposition...). La droite unie a levé l'étendard du patriotisme pour défendre les 3000 balles de subvention accordée à l'Association suisse des sous-officiers, que la gauche a supprimée pour financer la «Bâtie des enfants»). Héroïque combat patriotique qui n'a d'ailleurs pas tardé à exhaler quelques remugles racistes, le naturel revenant toujours, en tapinois ou au galop (d'où la proposition de la droite en question de supprimer la subvention à l'Université populaire africaine), quand on espérait avoir réussi à le civiliser quelque peu.  Quand un Conseiller municipal ou une Conseillère municipale PLR intervient intelligemment pour défendre une proposition ou une position intelligente (ça arrive...), vous pouvez être sûrs que dans les cinq minutes qui suivent, la cheffe du groupe interviendra bêtement pour dévaluer la proposition intelligente de son ou sa collègue et déconsidérer l'ensemble de son groupes. Pour ensuite se plaindre qu'on n'en considère pas les propositions, fussent-elles les plus idiotes.

Bref, la Ville de Genève a un budget. Un budget de gauche ? C'est vite dit. Pas un budget de droite, en tout cas : le Conseil administratif a maintenu les mécanismes salariaux qu'il avait, un temps envisagé (ou fait mine d'envisager) de suspendre pour réduire le déficit, il a augmenté la subvention de l'Orchestre de Chambre de Genève et celles du «Plan climat», il a accepté d'étendre aux nettoyage des toilettes publiques le projet d'internalisation du nettoyage qu'il avait dans un premier temps limité à quelques bureaux de la Vieille-Ville (ce à quoi, évidemment, toute la droite s'est opposée). La gauche a fait passer plusieurs amendements améliorant le projet de budget initial, mais bon, on a quand même échoué, faute d'unité, à faire passer l'augmentation de la contribution à la solidarité internationale (on est toujours en-dessous des 0,7 %) et à engager deux travailleurs sociaux «hors-murs», mais finalement, on a applaudi le budget qu'on a produit. Et qui a même été voté par le MCG et le PDC. L'esprit de Noël, quoi. Qui a soufflé (avec intermittence, il est vrai) sur le Conseil municipal après avoir superbement ignoré le Grand Conseil. Il est pas con, l'esprit de Noël, il sait choisir où ça a un sens de souffler. 

C'est pas la série, même pas la minisérie, du siècle, et c'est bien loin d'atteindre à l'irrespect cultivé par les Monty Pithon, mais bon, c'est une minisérie de la télé romande, ça dure quelques minutes, c'est supposé évoquer «avec légèreté et humour» la vie de Jésus (d'ailleurs, ça s'appelle «la vie de J.C.», et il ne s'agit pas de Jacques Chirac...), c'est pas trop long et ça peut se regarder avec le sourire, mais ça fait pas marrer tout le monde : «la vie de J.,C.» a suscité à Genève une manif de cathos intégristes, ceux de «Civitas», le 29 octobre, pour «dénoncer le contenu blasphémateur de cette émission». Bon, ça n'a pas été une manif de masse (une trentaine de personnes y ont participé), et ça s'est terminé par une prière au chapelet. Pour instaurer, comme le propose Civitas, «le catholicisme comme religion officielle de la Suisse», va falloir évangéliser dur, les gars.

Une entreprise genevoise établit régulièrement un classement des Etats (elle en classe 196) en fonction d'un indice global de corruption. Cet indice se compose de deux sous-indices, l'un de corruption propre-ment (si on ose écrire) dite, l'autre des autres crimes et délits «en col blanc» : blanchiment, fraude, finan-cement du terrorisme... En tête du classement global, les pays les plus vertueux sont surtout scandinaves (la Finlande est première, la Norvège deuxième, le Danemark quatrième, la Suède cinquième et l'Islande neuvième. Et en queue de classement, on trouve, dernière, la Corée du Nord, derrière la Syrie, la Libye, et le Yemen. Quant à la Suisse, elle est 48ème au classement de la lutte contre le blanchiment, juste avant le paradis bancaire offshore de Nauru, et douzième au classement global (où elle a reculé de quatre places), juste avant Singa-pour. En termes diplomatiques, on dira qu'elle peut mieux faire. Peut, mais ne veut pas. Qu'on soit meil-leurs que la Corée du Nord, c'est supposé nous satisfaire ?

Le 29 octobre, l'Office cantonal gene-vois des assurances sociales annonçait que désormais, les rentes AVS ne seraient versées que le sixième jour ouvrable du mois, au lieu du premier actuellement. Motif : un changement de système informatique. Insurrection générale chez les retraités, dans les syndicats, à gauche et jusqu'au Conseil d'Etat. Du coup, l'OCAS fait un peu marche arrière : désormais, toujours pour la même raison foireuse, les rentes seront versées le quatrième jour ouvrable du mois. Résignation géné-rale, mais faut comprendre  : on est bien trop contents qu'elles soient encore versées, les rentes AVS...

Y'en a qui doutent de rien : la Coordination genevoise pour le droit de manifester, par exemple, qui demande au Conseil d'Etat de modifier le règlement d'application de la loi idoine pour, en distinguant les manifestations à caractère idéal des manifestations à caractère commercial, que l'on renonce à encaisser des émoluments (de vingt à cinq cent balles) pour autoriser les premières, ce qui plaira sûrement à GHI qui faisait une tartine des toutes ces manifs qui énervent les Genevois (à se demander qui manifeste à Genève : pas des Genevois ? ou alors pas des vrais ?). Comme le suggère l'avocat Raphaël Roux, cette taxe, qui ne rapporte que des clopinettes à l'Etat, n'aurait-elle d'autre fonction que celle de «rendre plus compliquée l'organisation de manifestations politiques» ? En tout cas, ça ne dissuade pas grand monde d'en organiser, des manifs. Auto-risées ou non, d'ailleurs.  Faut vous résigner, les gars : à G'nêêêêve, on l'a dans le sang, la culture de la manif. Bon, d'accord, on a aussi celle de la râlerie contre les manifs. Mais seulement contre les manifs des autres.



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