Mise en consultation de la politique culturelle cantonale genevoise : On nous demande notre avis ? Donnons-le !

Le Département de la cohésion sociale met en consultation jusqu'au 22 mai l'avant-projet de "refonte de la politique culturelle cantonale" genevoise. Un avant-projet qui consiste en deux documents : un avant-projet de loi "pour la promotion de la culture et la création artistique" et un projet de "lignes directrices de la politique culturelle cantonale". Il s'agit de mettre en oeuvre l'initiative populaire (IN 167 "pour une politique culturelle cohérente à Genève", massivement acceptée en 2019, et qui exige du canton qu'il prenne, enfin, ses responsabilités en matière de politique culturelle, en concertation avec les communes et en consultant régulièrement les actrices et acteurs de la culture. En 2019, un message du Conseiller d'Etat sur la mise en oeuvre de l'initiative avait dû être frappé de caducité, compte tenu des réactions pour le moins négatives qu'il avait suscité dans les milieux culturels. On repart donc dans une consultation, sur la base de nouveaux textes dont l'ambition est de "créer un nouveau cadre pour une politique culturelle cantonale cohérente à Genève", comme la constitution désormai l'impose à un canton quasi absent de cette politique culture -et surtout de cette cohérence. Cette consultation est ouverte à toute personne intéressée -et on conviendra que, s'agissant de politique culturelle, toute personne devrait l'être. Vous avez donc sûrement quelque chose à dire (à écrire), alors dites-le, écrivez-le en passant par le site de la consultation  https://www.ge.ch/actualite/consultation-publique-relative-politique-culturelle-cantonale-18-03-2022

(Seuls les avis transmis via le questionnaire en ligne seront pris en compte.


Prenez la parole, la politique culturelle le vaut bien !

Que propose l'avant-projet de loi proposé par le Département de la cohésion sociale, et approuvé par le Conseil d'Etat ? A l'en croire, "le socle solide sur lequel fonder une politique culturelle nourrie par une vision partagée de la place essentielle qu'occupe la culture dans notre société". Noble ambition, qui mérite d'être confrontée au texte qui veut la concrétiser, et par lequel le Conseil d'Etat assure que "le canton réaffirme un soutien fort au domaine de la culture". "Réaffirme", vraiment ? Disons plutôt, "affirme... enfin". Dans son message de lancement de la consultation, Thierry Apothéloz rappelant que pendant la pandémie, "les milieux culturels se sont organisés et mobilisés et (que) des rencontres régulières ont eu lieu avec le canton. Il en est résulté une meilleure connaissance mutuelle". Elle manquait, en effet.

Le canton de Genève veut, enfin, mener une politique culturelle. On ne peut que saluer cette volonté. "La culture est un facteur de cohésion sociale et d'émancipation individuelle, condition fondamentale pour garantir une démocratie saine et portée vers le progrès", écrit Thierry Apothéloz. Comment le contester, en douter ? L'espèce humaine ne fait société que par la culture -mais une fois qu'on l'a rappelé, on fait quoi ? Et que se refuse-t-on à faire ? Le canton devrait, si les propositions soumises à consultation passent tous les obstacles politiques qu'elles ont à franchir, soutenir la création et pas seulement la diffusion, mais quelle création ? Le pouvoir politique ne peut en tout cas pas déterminer le contenu de la création culturelle et de sa représentation: ce n'est pas son rôle, et à chaque fois qu'il se met à le faire, le résultat est calamiteux, qu'il soit sulpicien ou réaliste-socialiste. Ce que le pouvoir politique peut faire, c'est déterminer les critères du soutien qu'il entend apporter aux acteurs culturels, aux institutions culturelles, à tel ou tel champ culturel.

On ne peut guère présager du destin qu'auront les texte aujourd'hui soumis à notre sagacité (et qui remplaceront l'actuelle loi sur la culture et une part de la loi sur la répartition des tâches), tant est encore long le chemin qu'ils devront emprunter avant que d'être approuvés définitivement ("nos intentions pour l'avenir (...) demanderont vraisemblablement plusieurs législatures pour se développer pleinement", prévient Thierry Apothéloz) et tant sont nombreux les doutes qu'on peut avoir sur ce qui sortira, d'abord de la consultation (qui fera l'objet d'un rapport établi par un mandataire externe, lequel "servira de base à l'adaptation des documents"), puis de la décision du Conseil d'Etat sur le contenu du projet de loi qui serait transmis au Grand Conseil en septembre, puis de la décision du Grand Conseil -le texte qu'il adoptera, s'il en adopte un, étant au final soumis à référendum facultatif. Mais si on ne sait pas ce qui sortira de ce parcours qui tient autant du Jeu de l'Oie que du parcours du combattant, on sait que pour donner à une nouvelle loi sur la culture un contenu qui soit à la fois acceptable et utile, notamment pour ce qui concerne les moyens dont le canton est capable de se doter pour mener unse politique culturelle, il faudra que toutes celles et tous ceux, individus et collectifs, qui ne se satisfont pas de l'état actuel de cette politique (ou de cette non-politique) cantonale prenne part à la consultation ouverte, et disent haut, fort et clair ce qu'ils pensent des textes proposé . Y compris de celui de "lignes directrices de la politique culturelle cantonale", que le Département de la Cohésion sociale présente en ces termes : "pour la première fois, le canton de Genève se dote d'une feuille de route" pour une politique culturelle (la Ville en disposant déjà pour la sienne). Toute la question étant de savoir quelle route est tracée sur cette feuille. Et où elle mène. Et quel sera le prix du péage, et qui devra s'en acquitter... Thierry Apothéloz propose que le canton accorde 1 % de son budget à la culture, ce qui représenterait 95 millions de francs par an. Presque le triple de ce qu'il y consent aujourd'hui, mais encore trois fois moins que ce qu'y consent la seule Ville de Genève. Et encore : sur les 60 millions supplémentaires consacrés par le canton à la culture, la plus grande partie serait compensée par un transfert de charges... sur les communes... Une politique cantonale payée par les communes, en somme...

On reviendra sur le contenu des propositions du Conseil d'Etat. Pour le moment, on ne fait que vous inviter à participer à la consultation ouverte sur ces projets, jusqu'au 22 mai : Prenez la parole, la politique culturelle le vaut bien ! 

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