Rapport sur le "dégrappage" du bitume des Pâquis : Tout ça pour ça ?
Foin de l'Ukraine, de la variole du singe, des Talibans, des menaces de crise énergétique, parlons de l'essentiel. Donc, un avocat qui devait se faire chier dans son étude pendant la canicule a adressé au Ministère Public genevois une dénonciation, portant sur le "dégrappage" du bitume pâquisard par les associations Actif Trafic et Survap. L'avocat dénonce "dommage à la propriété, tentative de contrainte et entrave à la circulation publique", pas moins. Du même mouvement, le robin a aussi saisi le Département de la Cohésion sociale, chargé de la surveillance des communes. En revanche, il ne semble pas avoir saisi le Conseil fédéral ni le Conseil de Sécurité. Sa démarche est la dernière en date (sauf erreur ou omission) de toutes celles qui ont émergé des vapeurs estivales de la droite municipale genevoise, qui s'en en est prise on seulement à la Conseillère administrative Frédérique Perler, supposée être coupable d'avoir quasiment autorisé le "dégrappage", mais aussi à la présidente du Conseil municipale (une autre Verte), Uzma Khamis Vannini, à qui elle reproche de ne pas avoir fait respecter le règlement du Conseil (ou plutôt la lecture sélective qu'en fait la droite) lors de l'"heure des questions" qui a ouvert la séance extraordinaire (et parfaitement inutile, quoique coûteuse) que la droite a fait convoquer pour gloser sur l'attitude de la Conseillère administrative dans l'"affaire du dégrappage"...Quant au Conseil administratif de la Ville, il a reçu le rapport dont il avait chargé l'ancienne juge d'instruction Christine Junod pour déterminer les responsabilités dans l'action réputée illégale des associations. On ne sait si ce rapport, qui ne fait finalement état que de malentendus et de mauvaise communications entre la Ville et les association, mettra fin à la polémique picrocholine qui a animé l'été politique genevois, mais en tout cas, il la remet à sa place : marginale, folklorique, dérisoire. Il ne nous reste finalement qu'à faire quelque bon usage de cet épisode, puisque comme le dit le proverbe, "de toute mauvaise herbe bonne soupe se peut faire".
"Un jour devant nos yeux..."
Donc, le
Conseil administratif de la Ville, a reçu (et a diffusé) le
rapport dont il avait chargé l'ancienne juge d'instruction
Christine Junod (une libérale mandatée par un exécutif de gauche
... c'est mignon, non ?) pour
déterminer les responsabilités dans l'action réputée illégale
de "dégrappage" du bitume pâquisard. Il dit
quoi, le rapport ? En gros (vous pouvez l'obtenir sur
https://www.geneve.ch/sites/default/files/2022-08/Rapport-degrappage-bitume.pdf),
il dit que la Conseillère administrative n'a pas autorisé
le "dégrappage", qu'elle et ses services ont surtout agir
pour obtenir des associations qu'elles renoncent à creuser
le bitume assez profond pour planter un arbre, ce qu'elles
avaient initialement l'intention de faire, mais ce qui
comportait le risque d'atteindre les canalisations et les
réseaux souterrains, et ce à quoi, averties de ce risque
par les services de Frédérique Perler, elles ont renoncé à
faire.. En somme, la Conseillère administrative a fait son
boulot. Tout ça pour ça ? Eh oui, tout ça pour ça. Mais de
"ça", il reste possible de faire quelque bon usage au Conseil
municipal. En rappelant au Conseil administratif ses propres
engagements, et en exprimant le soutien du parlement de la
Ville aux actions (mêmes légales) des associations d'habitants
en
faveur d'une améliorations des conditions de vie dans leurs
quartiers, de leur végétalisation, de leur accès à l'eau
libre et de la réduction de l'emprise du stationnement des
véhicules motorisés sur le domaine public. Tout ce dont
participait le fameux "dégrappage" pâquisard, dont le
rapport Junod rend responsable les associations (et non la
Conseillère administrative -à qui on ne reprochera qu'une
chose : d'avoir présenté des excuses pour avoir fait ce
qu'elle a fait...).
Le Conseil
administratif, "sur la base des conclusions de l'ancienne
juge", a décidé d'amender les organisateurs du"dégrappage",
pour n'avoir pas respecté les conditions de l'autorisation
qui leur avait donnée, non de "dégrapper", mais d'organiser
une petite manifestation "ludique", et de leur facturer les
frais de remise en état du domaine public (estimés fin juin
à 3802 francs) , ce que les associations ont admis sans
rechigner, en admettant "le caractère non conventionnel de
leur action", mais en en revendiquant la légitimité.. On
pourrait d'ailleurs se faire un plaisir de les aider à payer
leur amende grâce aux jetons de présence qui nous ont été
versés pour la séance extraordinaire du Conseil municipal
que la droite avait trouvé utile de faire convoquer : la
séance n'a servi à rien ? autant que nos prébendes servent à
quelque chose...
Dès lors, il devrait
nous importer de faire de cet épisode le prétexte à quelques
rappels et quelques recommandations indispensables,
à la Municipalité. Une motion sera donc déposée à la
prochaine séance du Conseil Municipal. Elle rappellera qu'il
y a une urgence climatique, que la température annuelle
moyenne à Genève devrait augmenter de 2,5°C dans les dix
ans, et les "jours tropicaux" tripler d'ici 2050. Elle
rappellera aussi l'effet d'îlot de chaleur
des surfaces asphaltées, l’inégalité
persistante de la végétalisation des différents quartiers de la
Ville, et donc la nécessité de prioriser celle des quartiers les
moins végétalisés, l'objectif proclamé du canton de planter
150'000 arbres pour obtenir une couverture arborée de 30 % de la
zone urbaine (elle n'est actuellement que de 22 %, et fort
inégale selon les quartiers (30 % à Champel ou Florissant, 5 %
aux Pâquis, 9 % à la Jonction), et l'objectif de la Ville de
rendre 10'000 m2 de surfaces perméables
aux eaux, tel que fixé dans le Plan climat de la Ville. Enfin,
elle insistera sur l'urgence de préserver
la population, à commencer par ses composantes les plus
fragiles, des conséquences des fortes chaleurs.
Ces rappels faits, en regrettant qu'il faille les faire tant ils relèvent de l'évidence, on demandera donc au Conseil administratif d'apporter tout le soutien possible aux actions des associations d'habitants en faveur d'une améliorations des conditions de vie dans leurs quartiers, de leur végétalisation, de leur accès à l'eau libre et de la réduction de l'emprise du stationnement des véhicules motorisés sur le domaine public; d'établir une procédure de traitement rapide des projets déposés par les habitants des quartiers; d'engager réellement et rapidement la réalisation de "trames vertes" dans les quartiers les plus densifiés, comme les Pâquis; de poursuivre et de renforcer l'action de la Ville contre les îlots de chaleur, pour la désimperméabilisation du domaine public et la facilitation de l'infiltration des eaux, et le rééquilibrage pérenne de l'affectation de l'espace public en faveur des déplacements non motorisés, prioritairement des déplacements piétons, et enfin de créer un fonds pérenne, doté de moyens suffisants, dédié aux actions précédemment évoquées, en sus des investissements déjà prévus.
"Un jour devant nos yeux
Surgira le vrai visage
de cette ville
Devant nos pieds
se déploieront les routes
et pousseront les fleurs"
(Grisélidis Réal)
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