Le logement : un droit, pas une marchandise

La rue, les urnes

Demain, samedi, une manifestation pour davantage de logements bon marché et contre le démantèlement du droit du bail partira à 16 heures de la poste du Mont-Blanc, à Genève, pour se rendre sous les anciens hangars des TPG, à la Jonction. La manifestation est convoquée par une trentaine d'organisations, d'associations, de collectifs, allant de l'Asloca à la CUAE (syndicat étudiant) et les grèves féministe et du climat -mais les partis politiques ont été tenus à l'écart de l'organisation de la manifestation -ce qui n'empêchera pas leurs militantes et militants d'y prendre part (du moins si un congrès ne les en empêche pas)... Des enjeux référendaires rendent cette mobilisation plus nécessaire encore : le droit au logement est à défendre, dans la rue et dans les urnes.

La crise du logement : une crise fabriquée, pas une fatalité

Samedi, à Genève, on manifestera donc pour le droit au logement. Un droit rendu illusoire par la pénurie, le montant des loyers, les attaques politiques et juridiques contre les protections légales (le droit du bail). La nouvelle bataille du droit du bail, c'est-à-dire des droits des locataires, est engagée : la droite du parlement fédéral a fait adopter deux textes, contre lesquels un double référendum a été lancé et a doublement abouti) pour déréguler ce droit et affaiblir les protections de ces droits. La droite est à l'offensive : elle accepté une initiative parlementaire UDC autorisant le bailleur à refuser une sous-location de plus de deux ans, et une initiative parlementaire PLR qui affaiblit les conditions auxquelles un propriétaire peut récupérer son bien (autrement dit, virer un locataire) pour son "besoin propre" -ce sont ces deux propositions qui vont être soumises au vote populaire. Ensuite, le combat va porter sur l'assainissement énergétique des immeubles : qui va en payer la facture ? le propriétaire ou le locataire ?

La crise du logement qui frappe Genève, depuis longtemps, ne relève pas de la fatalité : elle est la conséquence de choix politiques qui renforcent la pénurie de logements accessibles financièrement à la majorité de la population, et poussent des milliers de résidents genevois à cesser de l'être pour s'installer là où se loger coûte moins cher, que ce soit en location ou en propriété : dans le canton de Vaud ou en France.

De plus, à Genève, ou il n'y a que 18,7 % de propriétaires de leur logement (dix points de moins que dans le canton de Vaud, la moitié que la moyenne fédérale, le tiers du taux valaisan) plus de 16 % des logements sont suroccupés  en Ville de Genève (9,4 % à Lausanne, 7,2 % à Zurich) et 27% sous-occupés dans le canton. Des centaines de milliers de personnes habitent donc dans des logements trop exigus ou trop vastes. Et ne trouvent pas de logements disponibles d'une taille convenant au nombre de personnes (à la composition du ménage) à loger, dans une ville où le taux de logements vacants stagne à 0,5 % et où la densité de la population ascende à 12'768 habitants au km2.

Genève est un cas d'école, mais pas une exception : dans toutes les villes, une crise du logement frappe la population la plus modeste -et l'impossibilité de se loger dignement la population la plus précaire. On ne parle pas là des sdf, on parle d'une part considérable de la population. Le paiement du loyer est une charge récurrente, d'autant plus lourde que le revenu disponible du locataire est faible. Et repousser les échéances du paiement n'est pas une solution quand les retards s'accumulent : trois ou quatre mois d'arriérés à régler, même avec un échelonnement, en sus du loyer courant, cela peut représenter une charge impossible à assumer, en sus d'une menace de rupture du bail qu'il faut constamment repousser.

L a rapporteuse spéciale des Nations-Unies sur le droit du logement, Leilani Farha, a lancé, avec le réseau de villes "Cités et gouvernements locaux unis", une initiative ("The Shift") revendiquant la concrétisation du droit au logement comme droit fondamental. La haut-commissaire adjointe des Nations-Unies aux Droits de l'homme, Kate Gilmore, en appelle pour sa part à une urbanisation capable d'éliminer les inégalités et la discrimination. Vaste programme, lourd enjeu politique : la sécurité du logement est un enjeu majeur, que seuls peuvent assurer des logements en mains publiques ou contrôlés par une collectivité publique, peuvent répondre.  Et pour que ce contrôle public du logement puisse réellement se faire, le contrôle public du terrain devrait pouvoir être imposé, d'une manière ou d'une autre -mais on en est encore bien loin. S'en rapprocher est un combat politique qui tient de l'urgence sociale. Une de plus. On n'en manque pas.

Il ne nous reste à les relier entre elles, pour pouvoir mener ensemble les combats nécessaires. Et cela, c'est précisément la fonction d'un parti politique -comme, par exemple (cité au hasard) le Parti socialiste...

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