Brèves de comptoir

 Tu as 90 ans aujourd'hui, alors salut à toi, Jean Ziegler, «né dans un pays corrompu mais libre» et faisant de cette liberté une arme contre cette corruption, inconsolable de l'ordre cannibale du monde, dénonciateur d'une Suisse qui se voulait au dessus de tout soupçon tout en lavant plus blanc, porte-voix des perdants magni-fiques pour que le cerveau du monstre les entendent, professeur de sociologie dont la nomination dut être littéra-lement imposée à ceux que tu insupportais, rapporteur des Nations Unies pour le droit à l'alimentation devant rappeler sans cesse que ce droit est encore à conquérir, tu fus aussi Conseiller national pendant 28 ans sous des couleurs trop socialistes pour des socialistes décolorés.
Tu rappelles ces mots de Brecht: «Celui qui lutte peut perdre. Celui qui ne lutte pas a déjà perdu» Brecht était pessimiste : celui qui lutte ne peut pas perdre, sa lutte même est une victoire contre la résignation. Hier, on célébrait un autre anniversaire: les  cent-vingt ans du premier numéro de l'Humanité. Avec l'édito d'un autre Jean, qui proclame que c'est  «à la réalisation de l'humanité que travaillent tous les socialistes» et que «seul le socialisme, en absorbant toutes les classes dans la propriété commune des moyens de travail, résoudra cet antagonisme et fera de chaque nation enfin réconciliée avec elles-même une parcelle d'humanité»
(Jean Jaurès, texte intégral sur http://canempechepasnicolas.over-blog.com/article-18-avril-le-premier-numero-du-journal-l-humanite-en-1904-103614161.html)
Bons anniversaires, les Jean...

Les entreprises suisses de transport public tiennent depuis 2019 un re-gistre national des resquilleurs. Et il y a de plus en plus de monde inscrits dans ce registre. Pas loin d'un million de personnes fin 2023 (frontaliers et touristes compris), dont la moitié a moins de 28 ans.  Et deux tiers des inscrits (majoritai-rement des hommes, avec une surreprésentation zurichoise et romande) sont des récidivistes, et 7% des multirécidivistes, qui se sont fait piquer au moins six fois. Et la resquille coûte au moins 60 millions de francs par année aux transpor-teurs. Dit comme ça, ça a l'air d'être beaucoup, mais en fait, c'est pas grand chose. Moins du tiers du boni de l'exercice budgétaire 2023 de la seule Ville de Genève, par exemple. Une paille, quoi. Mais qui fait clignoter l’œil des transporteurs, qui, fâchés, proposent de doubler, voire de tripler le montant de la deuxième amende pour resquille, qui passerait de 130 à 260 balles. Ouais, bon, et alors ? Les vrais récidivistes, ceux qui appliquent déjà la gratuité des transports publics, ils ne la paient pas l'amende, et ils ne la paieront pas plus si on la double... Ya que les récidivistes amateurs, les occasionnels, que ça peut effrayer, l'amende. En plus, la répression de la resquille, ça coûte bonbon, et pas aux resquilleurs multirécidivistes mais aux entreprises de transport public, et donc à l'Etat : faut payer les contrôleurs, payer les procédures de recouvrement, payer les procédures pénales et, au bout du compte, payer l'incarcération des irréductibles. Et tout ça pour cons-tater au bout du mécompte qu'il y en a de plus en plus, de récidivistes. Du coup, les entreprises (dont les dirigeants et les cadres bénéficient, eux, comme des milliers d'élues et d'élus municipaux, cantonaux, fédéraux, de la gratuité des services de leurs entreprises, soit dit en passant) proposent donc de doubler, voire tripler, les amendes. Pour quel résultat prévisible? Aucun. A part  plus de travail administratif. Autrement dit, c'est de la connerie pure. De la gesticulation. Du gaspillage. Bon, sur ce, on vous quitte on a des courses à faire à Annemasse. Parce qu'en plus, on fait des courses en France. En y allant en tram. En resquillant. Récidiviste et cumulard, on est...

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